Archives par étiquette : diffusion anarchiste

[Publication] ‘Séditions’ n°2 – Mai 2015

Le deuxième numéro de ‘Séditions’ vient de paraître, exceptionnellement sous forme d’un huit pages. Il est disponible à prix libre à la librairie l’Autodidacte et à la SPAM (place Marulaz), au bar ‘Ze Muzic All’ (rue Rivotte) et lors de distributions spontanées dans la rue.

Voici une rapide présentation des thèmes qui y seront abordés:

  • Le seul terroriste, c’est l’Etat (aperçu des dernières lois anti-terroristes adoptées en France)
  • Les « 408 », en guerre contre le pouvoir et ses outils de contrôle
  • Besançon: une ville sous occupation policière et militaire
  • Quand « prévention » rime avec gentrification
  • « Bien Urbain » ou l’art de la gentrification
  • Opérations répressives en Espagne (Pandora et Pinata): affiche en solidarité avec les compagnon-nes anarchistes séquestré.e.s et arrêté.e.s

Si vous souhaitez le recevoir chez vous, n’hésitez pas à écrire à l’adresse seditions[at]riseup[point]net.

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[Reçu par mail]

Pour rappel, le premier numéro. L’édito ici.

[Publication] Des Cinq de Haymarket à Sacco et Vanzetti : Tous innocents, tous martyrs?

Les anarchistes, des idéalistes inoffensifs ? C’est l’image qu’en donnent certains (dont des anarchistes) à travers une réécriture de l’histoire qu’ils ponctuent de mythes et de figures de martyrs, innocentés comme des martyrs chrétiens. Mais tout cela ne peut se faire qu’au prix de la dissimulation, entre autres, de certains aspects de la vie et de la pensée de ces mêmes compagnons, et donc la trahison de leurs idées. Dépeindre les cinq compagnons exécutés suite aux événements d’Haymarket à Chicago ou Sacco et Vanzetti comme de simples idéalistes, doux rêveurs inoffensifs, presque pacifistes ou syndicalistes, est une insulte à leur mémoire et à leurs vies passées à combattre le pouvoir avec les idées, mais aussi avec les armes. Dans ce petit recueil réalisé à l’occasion d’une discussion à Paris, tentative est faite de réhabiliter leur mémoire, loin de toute « innocence » ou « culpabilité » que nous laissons aux juges et historiens, et plus proche de nos perspectives révolutionnaires ou insurrectionnelles, que ces compagnons revendiquaient tous.

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Cette brochure est éditée en collaboration avec la bibliothèque anarchiste La Discordia à Paris, à l’occasion d’une discussion le mercredi 20 mai 2015 à Paris.

Ravage Editions

[Publication] Au pays des démocraties

« La question –dit Alice– est de savoir
si vous avez le pouvoir de donner
tant de significations différentes aux mots.
La question –dit Humpty Dumpty– est de savoir
qui commande, voilà tout. »

cratie_brochAlice, idéaliste un peu ingénue, est en train de se demander ces jours-ci s’il est possible que le mot « terroriste » ait un autre sens, dictionnaire historico-éthique en main. Humpty Dumpty, matérialiste un peu mal dégrossi, lui répond que vu que c’est l’Etat qui commande, et vu que le langage appartient à celui qui commande, alors « terrorisme » signifie ce que veut l’Etat. Voilà tout.

Dans les années 70, l’Etat accordait l’appellatif de « terroriste » à quiconque lui contestait le monopole de l’utilisation de la violence, c’est-à-dire employait des armes à feu ou des explosifs, surtout aux participants d’organisations combattantes spécifiques, surtout si ces organisations étaient l’expression d’un plus vaste mouvement de contestation, surtout si cette contestation visait à déclencher une révolution. Pour l’Etat, c’étaient surtout ceux qui l’attaquaient les armes à la main qui étaient des « terroristes ».

A présent que les organisations armées spécifiques ont presque entièrement disparu, que les arsenaux subversifs sont désespérément vides, que les mouvements de contestation empruntent rarement des dimensions considérables, qu’ils ne posent (presque) jamais la question révolutionnaire, Alice voudrait pouvoir en déduire que l’Etat a renoncé à l’utilisation de ce terme, le considérant incompréhensible à quelques exceptions sporadiques près. La définition de « terroriste » appliquée à celui qui prenait gendarmes et magistrats pour cible plutôt qu’adressée à celui qui massacrait travailleurs pendulaires et passants lui était déjà insupportable, mais en somme… vous savez comment sont les gens, lorsqu’ils voient du sang couler ils prennent peur et deviennent confus. On peut alors supposer qu’il n’a pas été trop difficile pour la propagande de jouer sur cette méprise, de démoniser le régicide et pas le tyran. Mais aujourd’hui, basta, après avoir assisté au cours de ces dernières décennies à une aussi triste baisse de funérailles institutionnelles, finissons-en avec l’épouvantail du « terrorisme » !

Eh bien non. En cette époque si dépourvue d’ « ennemis extérieurs » crédibles mais en même temps en manque de consensus solides, lorsqu’il n’est plus resté personne pour l’applaudir, l’Etat a décidé de prendre de l’avance, de ne pas attendre l’apparition de quelque menace subversive pour déployer la machine de guerre de la rhétorique anti-terroriste : mieux vaut prévenir que réprimer. Mais prévenir qui de faire quoi ? Comme l’affirmait un fin connaisseur de l’art de gouverner, « tandis que les individus tendent, poussés par leur égoïsme à l’atonie sociale, l’Etat représente une organisation et une limitation. L’individu tend continuellement à s’évader. Il tend à désobéir aux lois, à ne pas payer les impôts, à ne pas faire la guerre. Peu nombreux sont ceux — héros ou saints — qui sacrifient leur propre moi sur l’autel de l’Etat. Tous les autres sont en état de révolte potentielle contre l’Etat. »
C’est peut-être pour cela que l’Etat s’est permis de définir « terroriste » quiconque le critique, le contrecarre, s’oppose à lui, sans trop faire de distinction entre la signification des mots et la nature des faits ? Parce que, à part les saints à prier et les héros à décorer, tous les autres seraient de potentiels rebelles ?

« Mais cela n’a pas de sens ! ». Bien sûr que non, douce Alice, mais garde toujours en tête qui est-ce qui commande. Voilà tout.

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Comment cela a commencé
L’Etat s’équipe
Consensus et obéissance
Quelles conséquences ?
Les points sensibles

[Traduit de l’italien de Finimondo par Brèves du désordre, février 2015]

[Publication] Recueil sur la lutte contre les prisons de type C en Grèce

Si la nouvelle loi sur les prisons de type C est une nouvelle offensive dégueulasse de ce monde carcéral contre l’irréductible esprit de révolte qu’aucune loi ni répression ne pourra jamais étouffer, elle n’est pas plus que cela. Sur le modèle des Quartiers de Haute Sécurité en France ou du régime FIES en Espagne, elle n’est qu’une pierre ajoutée à l’édifice de la lutte des autorités contre les prisonniers de la guerre sociale. Tout particulièrement dans un contexte comme celui de la Grèce, où la lutte armée et la proposition de l’attaque diffuse, permanente et décentralisée, obtiennent l’appui d’un mouvement large et l’approbation tacite de plusieurs parties de la population. Il s’agit aussi pour l’État grec d’une partie de son offensive contre le mouvement révolutionnaire et la révolte diffuse qui l’agite depuis les débuts de leur « crise » et un certain mois de décembre 2008. Ce qui nous intéresse ici n’est donc pas l’énième loi scélérate du pouvoir, mais le souffle de rage qu’elle a provoqué, qu’elle provoque encore et qu’elle provoquera probablement jusqu’à la destruction de son idée même.

Recueil de textes et communiqués a propos de la lutte contre les prisons de type C en Grèce – 68 pages – février-avril 2015.

Sommaire :

• Quelques chiffres p.3
• Carte des prisons grecques p.4
• Introduction p.5
• Quelques slogans entendus dans les rues de Grèce : p.13
• Contre les prisons de haute sécurité p.14
• Intervention dans la prison de Korydallos p.18
• Jusqu’à la destruction de la dernière prison… p.20
• Contre les prisons de type C p.22
• Communiqué des prisonniers de la taule de Koridallos p.25
• Première déclaration des détenus de type C p.26
• Deuxième déclaration des détenus de type C p.28
• Refus de remonter en cellule au bouclage à Koridallos p.29
• Troisième déclaration des détenus de type C p.30
• Grèves de la faim dans les prisons grecques p.31
• Déclaration de début de grève de la faim du DAK p.34
• Manif solidaire à Athènes p.39
• Déclaration du DAK p.40
• Les membres de la CCF mettent fin à leur grève de la faim p.43
• Appel international du DAK p.44
• Chronologie non exhaustive de luttes entre les murs p.47
• Chronologie récente à l’extérieur p.57
• Annexe : Pour en finir avec le Prisonnier Politique p.63

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Pour plus d’informations et d’actualité en français sur la lutte contre les prisons de Type C et le mouvement anarchiste en Grèce, on pourra suivre en particulier les sites Non Fides et Contrainfo. On pourra également lire un texte dans le dernier numéro d’Avalanche.

Ravages Editions, 8 avril 2015

[Publication] Repose en paix sociale… Quelques notes autour de la mort de Clément Méric

Ces quelques notes ont pour objectif de réfléchir un peu à quelques questions qui méritent selon nous d’être posées, et ce à tête reposée, maintenant qu’un peu d’eau est passée sous les ponts. Il s’agit ici de mettre en évidence les impasses d’un certain antifascisme et de questionner notre réactivité, mais aussi de reposer la question de la solidarité révolutionnaire.

Ce texte a été publié pour la première fois dans la revue anarchiste apériodique Des Ruines n°1, en décembre 2014, à l’intérieur du dossier « Ni héros ni martyrs – Contre le culte de la charogne ».

On pourra lire la brochure en ligne ou la télécharger ici

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PS : au passage, voici notre nouvelle adresse mail, tous les mails envoyés à l’ancienne adresse ne seront pas lus.

contact:

[Reçu par mail, 5 avril 2015]

[Bruxelles] Aux indésirables – Mars 2015

Depuis plusieurs semaines, manifestations et blocages contre la politique d’asile se succèdent à Bruxelles. A plusieurs reprises, il y a eu des heurts (limités) avec la police. Hier encore (20 mars 2015), la Marche pour la liberté, avec ou sans papiers, a parcouru les rues du centre-ville de Bruxelles pour aller jusqu’au coeur de Cureghem. De là, le cortège est passé par la place Bara pour retourner vers le centre-ville.

Le tract en PDF

Le tract en PDF

AUX INDESIRABLES

Indésirables dans ce monde de fric et de pouvoir
Il y a toujours plus d’indésirables dans ce monde. Que ce soient les millions de refugiés qui errent sur cette planète ou les millions de personnes parqués dans les bidonvilles et les quartiers pauvres du monde entier. Que ce soient les sacrifiés des guerres et des dévastations industrielles ou les pauvres dans les pays européens jetés par-dessus bord au nom de l’économie. Que ce soient les courageux insurgés qui se sont soulevés aux cris de liberté et de dignité dans nombreux pays ces dernières années ou ceux qui osent se battre ici, au cœur des métropoles, contre un monde qui les étouffe.
Nous sommes toujours plus à être considérés comme superflus, inutiles, dangereux, improductifs, nuisibles par les maîtres de ce monde. Et pour protéger leur système et sauvegarder leur pouvoir, ils ne reculent devant rien. Ils ont transformé la Méditerranée en énorme fosse commune. Ils ont implantés des centaines de camps de concentration pour sans-papiers. Ils ont développé des technologies de pointe pour mieux nous identifier, suivre, contrôler. Ils brandissent la menace de l’expulsion, de la prison ou de la misère la plus abjecte pour nous faire accepter le rôle d’esclaves qu’ils nous ont réservés. Ils attisent la haine raciale et les conflits sectaires pour nous diviser. Bref, ils font la guerre aux indésirables d’ici et d’ailleurs.

Nulle part où fuir sauf…
Le capitalisme, l’Etat, l’autorité… ont désormais occupés tout le territoire, chaque centimètre de ce monde transformé à la fois en poubelle industrielle, prison à ciel ouvert, bain de sang et camp de travail. Partout, on voit la même logique à l’œuvre : exploiter, contrôler, manipuler, opprimer, massacrer. Et cette logique a aussi pénétrés nos cerveaux et nos cœurs : on n’arrive même plus à imaginer de faire autrement, sans maîtres et sans exploiteurs ; on vénère la marchandise et la consommation ; on les laisse piétiner notre dignité ; on n’ose plus se battre pour la liberté, pour nos rêves, pour la fin de la misère. On n’a nulle part où fuir.
Il ne reste qu’un seul pays, un seul espace, un seul territoire, où aller, vers lequel courir, dès maintenant, de toutes nos forces, même si on pourrait succomber dans la tentative. C’est la REVOLTE, l’insurrection de celui qui se soulève contre ce qui l’étouffe et le rend esclave. Notre communauté ne peut être que celle des révoltés, de ceux et de celles, de partout et de nulle part, de toutes couleurs et avec pleins de rêves, prêts à lutter pour la liberté, prêts à se mettre en jeu, à se battre avec tous les moyens contre le pouvoir qui nous écrase.

La mosaïque de nos combats
C’est la passion pour la liberté qui est capable de jeter des ponts entre les différents combats. Entre ceux qui se retrouvent sans-papiers et se battent contre l’Etat qui ne les veut corvéables à merci ou sinon expulsés et ceux qui sont déclarés criminels et s’affrontent aux lois faits pour protéger les riches et les puissants. Entre celles qui se battent contre la construction de nouvelles prisons, de nouveaux outils de répression, de frontières encore plus meurtrières et celles qui luttent à corps perdu contre la transformation des quartiers de cette ville en couloirs d’une grande prison à ciel ouvert pour plaire aux riches, aux eurocrates et aux classes moyennes friquées. Entre ceux qui attaquent les patrons et les capitalistes et ceux qui sabotent le train train quotidien qui nous tue à petit feu.
C’est une mosaïque des combats qui peut donc voir le jour. Mais celle-ci ne peut naître que si les combats restent les nôtres, qu’on ne les confie pas à des politiciens, des partis, des organisations officielles, mais qu’on continue à s’auto-organiser pour affronter le pouvoir. Et qu’on ose donner à ces combats les armes pour passer à l’offensive : les armes du sabotage et de l’action directe sous toutes ses formes. Car « l’injustice a des noms et des adresses ». Il est toujours temps d’aller toquer à leurs portes. A la porte du bureaucrate qui signe les ordres pour expulser des sans-papiers comme à celle de l’entrepreneur qui se fait du fric en construisant une nouvelle prison. A la porte des institutions et des entreprises qui collaborent aux rafles comme à celle des défenseurs de l’ordre. Et n’y allons pas pour parler avec celui qui de toute façon n’écoutera jamais. N’y allons pas pour négocier avec quelqu’un qui ne parle que le langage du pouvoir, des statistiques et du fric. N’y allons pas les mains vides, mais armés de la conscience de mener un combat offensif et déterminé. Allons-y pour défoncer leurs portes.

Que la peur change de camp

Soyons dangereux pour ceux qui veulent nous exploiter et gouverner

Feu aux centres fermés, feu aux frontières,feu aux prisons

Liberté pour tous et toutes

Publié sur la cavale

[Publication] Sortie de ‘Séditions’, journal anarchiste apériodique de Besançon et de ses environs

Voici le premier numéro du journal apériodique anarchiste ‘Séditions ‘. Il est présenté sous forme de dépliant 4 pages et est disponible, hormis lors de diffusions occasionnelles, à plusieurs endroits à Besançon: à la librairie L’Autodidacte (place Marulaz), au bar Ze Music All (rue Rivotte), à la SPAM (place Marulaz)

Lire le 1er numéro du journal

Lire le 1er numéro du journal

Ci-dessous l’éditorial publié à l’occasion de la sortie du premier numéro:

Le journal ‘Séditions’ part avec l’idée de renouer avec l’agitation urbaine dans une perspective anarchiste. Il n’a pas vocation à promouvoir une quelconque organisation, qu’elle soit formelle ou informelle, fusse-t-elle anarchiste. Il ne rentre pas non plus dans la démarche qui consiste à créer des alternatives au sein d’un monde qui nous écrase sous son autorité. Nous luttons pour la liberté totale de tous les individus et donc en dehors du champ de la politique; nous ne cherchons pas à rendre ce système de fric et d’autorité plus juste.

La ville change. Promoteurs immobiliers, entreprises du BTP, architectes et mairie investissent les quartiers dans l’intérêt des riches et de l’Etat.

Le besoin se faisait ressentir de mettre au centre des discussions les restructurations de l’Etat et du capitalisme qui, jour après jour, modifient notre environnement, nos lieux de vie et d’errance, nos trajets quotidiens en déployant sans cesse plus de moyens de contrôle et de surveillance sur chacun d’entre nous, tout en cherchant à diviser les exploités et dominés en catégories et à les monter les uns contre les autres (communautarismes religieux, ethniques et patriotisme,..)

Cette publication propose d’apporter des textes et des critiques pour passer à l’action contre cette ville qui est en phase de devenir une gigantesque prison à ciel ouvert.

Pour contribuer au journal, envoyer un article, une brève… : seditions[at]riseup.net

Reçu par mail, 15 mars 2015

[Publication] En guise d’avertissement

« Nous n’avons pas peur des ruines. Nous allons recevoir le monde en héritage. La bourgeoisie peut bien faire sauter et démolir son monde à elle avant de quitter la scène de l’Histoire. Nous portons un monde nouveau dans nos cœurs. »

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Cette revue se donne l’ambition de remuer les réflexions, recherches et débats autour des perspectives anarchistes et antiautoritaires. Certains débats vifs et toujours d’actualité, certains autres laissés de côté et exhumés pour l’occasion. Il ne s’agit pas d’un journal d’actualité et d’agitation distribué dans la rue et rédigé dans l’urgence, mais cela nous a paru tout aussi nécessaire et complémentaire. Parce que la sensation d’un manque se faisait de plus en plus forte, tout comme la nécessité de recommencer à se doter d’outils plus intemporels que d’habitude pour s’exprimer sur des choses plus profondes que les fils d’actualité non-stop, avec le temps et la place pour le faire. Elle s’adresse donc à un « public » averti (dont voici l’avertissement) et proche (ou pas encore) des enjeux soulevés. Notre but est de contribuer au développement de nos idées, trop souvent repoussé à plus tard par un activisme sans fond ou dans une passivité pratique et intellectuelle affligeante.

Si le manque de confiance en soi de la plupart des compagnon/nes nous empêche de produire de la théorie (et il y a aussi ces quelques gardiens du temple qui souhaiteraient que les idées restent centralisées entre leurs mains), ici, nous ferons foin de tout cela, car nous n’avons de comptes à rendre à personne et nous foutons éperdument des boutiquiers idéologiques et groupusculaires, occupés à s’adapter et à survivre, à perpétuer des dogmes et des hégémonies rarement soumis à l’autocritique, et rarement disponibles à la critique. Aussi, nous avons confiance en nos capacités, et refusons l’autoflagellation permanente dans laquelle se vautrent tant d’entre nous, refusant de se sentir capables ou pertinents à s’exprimer, alors qu’ils/elles le sont très largement. C’est pourquoi nous voulons rappeler que la pensée n’appartient pas aux intellectuels, l’histoire n’appartient pas aux historiens, l’anarchie n’appartient pas non plus à une quelconque intelligentsia de l’anarchie, ni à son intelligentsia adverse, elle nous appartient, elle appartient à tous ceux qui se donnent la peine de la faire vivre, chacun/e à sa manière avec ce qu’il/elle est, sans se laisser miner par les évêques et les inquisiteurs des petites chapelles idéologiques et de la bourgeoisie.

Bien qu’il soit de bon ton de le faire, déconstructions après déconstructions, nous refusons donc de nous considérer comme de la merde et des incapables, ce que ce monde souhaite et nous inculque par l’éducation, et que le milieu achève de nous faire accepter le long de ses brochures et de ses groupes de paroles qui visent à nous normaliser, mais différemment. C’est aussi pourquoi nous refusons de déléguer ce qui nous appartient à quelconque spécialistes, car les merdes, précisément, ce sont elles/eux.

Mais il nous faut maintenant définir ce que nous entendons par « anarchisme », mais cela serait trop long, alors nous le ferons un peu en négatif, un peu en positif. N’engageant que nous-mêmes dans ces quelques remarques.

L’anarchisme n’est pas un courant politique, il n’est donc ni de droite ni de gauche, mais complètement hors de cet échiquier-là et du référentiel général qui lui sert de canevas. Si il est né d’une scission anti-autoritaire du socialisme révolutionnaire, l’anarchisme a cessé depuis longtemps d’être un courant de la gauche en refusant l’organisation et les logiques autoritaires qui sont l’essence de tous les mouvements de gauche. Évidemment, ce n’est pas le cas de tous les anarchistes, et le mot « libertaire » a d’ailleurs été inventé pour décrire tout ce qui ressemble à de l’anarchisme et en a la saveur, sans en être réellement (par refus des conséquences pratiques logiques de ces idées). Les anarchistes ne sont donc pas un lobby politique visant à influencer la société et l’État avec ses idées et en faveur de ses intérêts.

Les anarchistes étant épris de liberté, et le mot « liberté » ayant largement été refaçonné depuis le
XXe siècle en un hédonisme qui n’a plus grand chose à voir avec nos idées, une autre erreur est récurrente : la confusion régulièrement faite entre anarchisme et conception libérale de la liberté, que ce soit à la TV ou dans des petits milieux universitaires ou post-universitaires pénétrés de French Theory et de ses oripeaux. « Je fais ce que je veux et je t’emmerde » n’a rien à voir avec l’anarchie telle que nous l’entendons. Il en va de même pour l’esprit de consommation des luttes et des corps qui vont souvent avec cette confusion répandue, même à l’intérieur du mouvement.

Les anarchistes doivent selon nous s’affranchir des totems, mais aussi des tabous, et notamment retrouver les capacités de désaliéner le langage employé pour nous asservir. Du moins autant que possible, le langage étant une aliénation en soi de la pensée (forcement plus complexe que des mots). Durutti affirmait que « la discipline est indispensable, mais qu’elle doit venir de l’intérieur, motivée par une résolution ». Discipline, travail révolutionnaire, mémoire, etc.

N’ayez crainte ! Les mots n’appartiennent pas qu’au pouvoir, ils ont un sens qui leur est propre, et anarchisme n’est pas gauchisme, ce n’est pas faire le contraire, penser le contraire, dire le contraire et donc proscrire en bloc tous les mots et les concepts humains employés par le pouvoir et ses rapports de domination. Nous voulons au contraire faire autre chose et nous réapproprier les moyens de notre émancipation en tant qu’individus conscients de leur unicité, associés sur des bases réciproques, et prêts à en découdre avec l’autorité.

Ces quelques affirmations, si on les comprend mal, feront sans doute consensus parmi celles et ceux qui passent le plus clair de leur temps à réformer le langage dans le but d’en faire un cheval de bataille de la déconstruction postmoderne. Mais que l’on ne s’y trompe pas. Le langage reste aujourd’hui l’un des seuls outils dont nous disposons pour exprimer nos idées. Si nous serons tous d’accord pour dire que le langage n’est pas neutre, car façonné par une tradition millénaire de domination, il faudra aussi accepter le fait qu’il est indispensable à nos perspectives, et que nous sommes bien obligés de nous en servir. La question à se poser devient donc : qui voulons-nous comprendre ? Et par qui voulons-nous être compris ? Mais ces questions, tant refusent de se la poser, faisant le choix facile de s’en foutre avec arrogance et de se réfugier dans des casernes identitaires confortables.

On voit depuis longtemps émaner des milieux contestataires des tentatives maladroites de rafistoler le langage, par diverses méthodes de féminisation (de la plus basique et juste jusqu’à l’illisible intégral), ou de grammaires et d’orthographes alternatives. Certain/es ont même le sentiment de changer le monde, se berçant de l’illusion d’être de grands révolutionnaires de par leur usage douteux mais volontaire de l’écriture. Mais alors revient sur le tapis cette même vieille question : par qui voulons-nous être compris ? En effet, on assiste parfois à ce que l’on pourrait nommer des dérives sectaires, notamment lorsque des brochures ne sont plus compréhensibles que par celles et ceux qui les écrivent et leurs ami/es. Il s’agit alors d’une forme de « sécession » qui n’a plus rien de révolutionnaire, puisqu’au lieu d’agir sur le monde, il ne s’agit plus que de vivre « en-dehors » de celui-ci, ce qui constitue encore une illusion. Car à force d’exagérer dans le rafistolage on finit par devenir illisibles, autant dire que certaines formes d’utilisations du langage ne sortiront jamais du petit milieu qui les a créées. Ainsi, nous pensons que ceux qui croient créer un langage « libéré » se fourvoient encore.

Si demain tout ce qui sortait des initiatives révolutionnaires écrites (tracts, affiches, brochures, livres, journaux…) était écrit de façon identitaire, non-genrée, non-spéciste, non-agiste, non-validiste (et autres ismes à l’infini…), plutôt que d’être un moyen pour communiquer, notre langage deviendrait une barrière qui nous séparerait du reste de l’humanité. Totalement coupés du monde, il ne nous resterait alors plus grand chose à faire, à part se faire réprimer dans l’isolement total (car en effet, qui se soucie de la répression exercée contre des petites minorités volontairement sectaires ?

Notre but n’est pas de nous isoler sur un territoire vierge avec tous nos copain/ines pour y parler notre novlangue identitaire et vivre nos rapports soi-disant « libérés », notre but est d’attaquer la domination partout où elle se trouve. Il faut se rendre compte que nous vivons dans un monde sans évasion possible. Qu’il n’y a pas d’ailleurs où guérir d’ici, pas d’oasis ou de plage de liberté possible tant qu’existeront le Capital, l’Etat et les divers rapports de domination qui les maintiennent. Nous sommes obligés de combattre ce monde en son sein, avec toutes les contradictions, limites et difficultés que cela comporte. Mais survivre n’implique-t-il pas déjà une quantité insoutenable de compromis ? C’est pour cela que nous embrassons la proposition révolutionnaire et internationaliste, et rejetons les alternatives et les diverses pseudo-autonomies locales, qui ne sont que des échelles réduites de ce monde de merde.

Aussi, nous refusons que des compagnon/nes se reposent dans l’ombre d’autres compagnon/nes, soi-disant mieux armé/es qu’elles/eux, plus âgé/es, plus expérimenté/es ou plus rhéteur/trices. Nous appelons donc chacun/e à se débarrasser de ses figures tutélaires et à se prendre en main, autant que nous appelons ces figures tutélaires à cesser de profiter et à se débarrasser de leurs rôles lorsqu’ils sont involontairement acquis (souvent le produit de l’inconsistance des autres), et à se faire foutre dans le cas contraire. Car nous refusons d’évoluer dans un milieu politico-mafieux.

Être anarchiste ou révolutionnaire n’est pas pour nous une posture, une opinion, un art ou une culture. Il n’y a pas de look anarchiste, pas d’identité, pas de signes de reconnaissance. Être anarchiste signifie lutter et combattre la domination, avec ses bras, ses jambes, son coeur et son cerveau, avec les conséquences négatives comme positives que cela implique. Être anarchiste ne consiste pas à affirmer des positions antagonistes de principe et à lire quelques bouquins aux couvertures rouges et noires, ni même à porter quelques opinions choc sur des tables de presse, dans les universités de la bourgeoisie, sur internet ou dans des squats fermés physiquement et/ou mentalement au monde extérieur. Ce même monde que tant prétendent vouloir révolutionner, sans pour autant tirer les conséquences de leurs postures de rebelles confortablement installés dans leurs habitudes, et reléguant la destruction à quelques slogans et gros titres sans conséquences.

Mais il ne s’agit pas non plus de se contenter de l’action pure et simple, pour notre petit plaisir hédoniste ou pour défouler nos frustrations en exaltant la seule « beauté du geste » comme des futuristes des temps nouveaux. Il ne s’agit pas non plus d’une agitation qui consisterait à informer ou venir en aide aux exploités, car les anarchistes ne sont pas des journalistes alternatifs, des humanistes ou des âmes pieuses et altruistes. En effet, nos actes sont tous réalisés par intérêt, pas par sympathie ni pour rembourser une dette morale, sociale ou intellectuelle. Nous ne nous battons pas pour les pauvres ou à leur service, mais contre la pauvreté. Pas pour les sans-papiers, mais contre les papiers, les Etats et les frontières. Pas pour les prisonniers, mais pour en finir avec toutes les prisons et la justice. Nos intérêts sont tout ce qui contribue à accentuer les conflictualités au sein de la société sans la reproduire en même temps. Notre objectif étant de faire le coup de poing avec les rapports de domination dans la société et d’y insuffler par nos interventions diverses des perspectives réelles et affichées, comme la révolution et la victoire, tout en portant un message antisocial intelligible au sein de la guerre sociale en cours depuis toujours. Tout cela sans croire que ces objectifs n’appartiennent qu’à nous, ou bien qu’ils le doivent. Qui croit encore sérieusement en un mouvement anarchiste (armé ou non) qui se suffirait à lui-même et réussirait à vaincre l’État sur son terrain militaire et stratégique (ou sur un terrain social par le biais d’une imaginaire opinion publique devant laquelle il faudrait présenter patte blanche), qui veut encore y croire ? D’abord à cause de l’évidente asymétrie, ensuite parce que nous pensons que nos seules victoires proviendront de tensions sociales insurrectionnelles qui ne pourront jamais reposer que sur nous-mêmes et notre évidente faiblesse numérique. Il faut être capable d’abandonner les mythes anciens de révolutions anarchistes pures et parfaites et embrasser les possibilités telles qu’elles se présentent à nous, tout en restant fidèles à nous-mêmes, c’est-à-dire sans céder aux sirènes du populisme et du possibilisme.

De nos jours, les anarchistes ne peuvent pas prétendre à mieux qu’à la construction d’une minorité agissante avec une réelle capacité d’intervention, de destruction, mais aussi de construction. Construction non pas d’un nouveau monde angélique ou d’alternatives, ou de « formes de vies », mais d’initiatives, de harcèlement, d’agitation, d’attaques, de continuité, d’approfondissement, de capacités techniques et théoriques réelles. Car nous voulons véritablement la révolution, pas nous contenter d’un romantisme agréable mais inconséquent.

Notre but n’est donc pas de créer ou de contribuer à la création d’une nouvelle anarchie, car l’ancienne, lorsqu’elle est débarrassée de ses logiques de partis et de leurs congrès internationaux d’hier comme d’aujourd’hui, de toute politique, de toute démagogie et de toute organisation permanente (prétendument informelle ou non) nous convient très bien, et fait même plus que nous convenir. Comme en témoigne le contenu de cette revue, il ne s’agit pas pour nous de faire table rase du passé ou de chercher la nouveauté à tout prix, comme cette époque d’ennui morbide nous y pousse. Pas d’anarchie 2.0 ici, donc. La mémoire du mouvement anarchiste est belle et complexe, sa tradition est bien la seule tradition que nous respectons, tout en la façonnant à notre tour, par l’acte et ici, par la pensée et la critique. Cette revue constitue donc également un hommage et un rappel des luttes et des compagnon/nes du passé, toujours présents dans un coin de nos têtes, et menacés par l’impérative modernité et son culte de la vitesse, du néant et de l’oubli.

image2editoPrécisons toutefois que tout ce que l’on pourra lire ici n’a qu’un seul but, celui de réconcilier l’agir et le réfléchir, parfois durement, et si le ton risque parfois d’effrayer les plus consensualistes de nos camarades et les éternels pleureur/ses du mouvement, nous espérons que le fond sera retenu pour ce qu’il est, et non pas écarté sous l’excuse de la « forme » et des petites vexations dues aux incivilités (ne jettes pas ton chewing-gum par terre camarade !) : réflexe pavlovien d’auto-défense classique de ceux qui refusent d’affronter leurs contradictions (au prix d’un certain confort) et d’affirmer leur rupture avec l’existant et ses mécanismes de consensus et de pacification des rapports (qui ont largement pénétrés, en France, le petit milieu et ses anarchistes). En effet, la critique aujourd’hui n’est acceptée que lorsqu’elle est polie et civilisée, ou lorsqu’elle n’est pas réellement critique. Que les éternelles âmes sensibles et susceptibles s’abstiennent donc de lire cette revue, au risque de trouver de nouveaux prétextes pour échapper à l’auto-critique.

Ces quelques pages s’inscrivent donc dans une tradition insurrectionnelle, critique et individuelle de l’anarchisme telle qu’elle fut porté par de nombreux anti-organisateurs du passé, et chaque ligne y sera rédigée par des individus en lutte d’aujourd’hui ou d’hier, illustres, anonymes ou les deux. Pas de philosophes ici, pas d’écrivains professionnels, pas de nihilistes de la petite bourgeoisie étudiante, pas de photos sensationnalistes de kalachnikov et de voitures enflammées ni de tartines de mots pour justifier son inaction ou ses actions merdeuses.

À la férocité, à l’intensité, à la conséquence.
Vive l’anarchie.

Pour exprimer vos inquiétudes par rapport aux querelles de pouvoir que cette revue pourrait provoquer dans les petites casernes idéologiques, pour toute réclamation, convocations, réquisitoires en diffamation, mises en examen, droits d’auteur et petits boutiquiers des idées :
vatefairefoutre@pissoff.com

Pour envoyer des traductions, des critiques (dans le ton qui vous conviendra), correspondre, contribuer, discuter, partager, distribuer, répondre ou remettre en question :
desruines@riseup.net

Edito de Des Ruines n°1, Revue anarchiste apériodique, décembre 2014.

Pour informations et commandes: desruines.noblogs.org

[Publication] Lucioles n°21 – février 2015

Lucioles est un bulletin apériodique, on peut y lire des textes d’analyse et d’agitation autour de Paris (et sa région) et de son quotidien dans une perspective anarchiste. On y parle des différentes manifestations d’insoumission et d’attaques dans lesquelles nous pouvons nous reconnaître et déceler des potentialités de rupture vis-à-vis de l’Etat, du capitalisme et de la domination sous toutes ses formes en essayant de les relier entre elles et au quotidien de chacun. Nous n’avons pas la volonté de représenter qui que ce soit, ni de défendre un quelconque bout de territoire en particulier qui n’est qu’un modèle réduit de ce monde de merde.

« Les lucioles on les voit parce qu’elles volent la nuit. Les insoumis font de la lumière aux yeux de la normalité parce que la société est grise comme la pacification. Le problème, ce ne sont pas les lucioles, mais bien la nuit. »

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Lire les articles du 21ème numéro de Lucioles

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Ni Dieux ni maîtres, encore et toujours !

another_myth_3_by_coalrye-d75wgdpDepuis ce matin du 7 janvier 2015, où douze personnes sont tombées sous les balles de deux fanatiques religieux ici même, en plein Paris, nous avons pu voir les brebis citoyennes trouver refuge dans l’asile sacré de l’appartenance nationale, et leurs bêlements être exploités par tous les politicards désireux de vendre leur soupe avariée démocrate et/ou sécuritaire. On crie à la défense de la liberté d’expression chère aux citoyens en tous genres. Mais que vaut-elle cette “liberté d’expression” si acclamée, et qu’aucun média ne permet de critiquer ?

Car c’est un pouvoir maintenu comme partout par ses flics en armes et ses tribunaux qui me donne ce droit, or le pouvoir punit et enferme tous ceux qui enfreignent ses lois, du fraudeur à la voleuse, de la prostituée au sans-papiers. Son hypocrisie ne l’élève pas au dessus des autres, il se trouve au même niveau que les partisans de la guerre sainte et il est tout autant notre ennemi. Comme toujours, des droits impliquent des devoirs, notamment celui de respecter des règles sous peine de sanctions. Aussi, je m’en fous de pouvoir m’exprimer si je ne peux pas agir en conséquence, car mes paroles ne sont alors que du vent, tout le monde peut dire ce qu’il veut mais la société continue son chemin comme elle est, dans la soumission passive ou active, éventuellement la dénonciation de principe mais toujours, dans les faits, l’acceptation. Être « libre » de s’exprimer mais enchaîné dans ses actes par les lois des codes pénaux, est-ce être libre ? L’« apologie » et l’« incitation » au terrorisme qui ont entraîné toute une flopée de condamnations montrent encore que le pouvoir peut toujours restreindre la limite des « libertés » qu’il accorde dès qu’il le souhaite. Non, nous ne trouverons pas de liberté dans la paix sociale qu’on tente de nous imposer, mais seulement dans l’accomplissement d’une volonté de vivre sans rien ni personne au dessus de nous, ni sur terre ni au ciel. C’est pour ça que nous ne pleurerons pas plus les trois flics que les trois fanatiques, car tous avaient décidé d’être au service d’un ordre supérieur et autoritaire dont ils croyaient exécuter la volonté, qu’elle prétende découler d’une parole divine ou de la raison d’État (en réalité l’intérêt des puissants régnant sur une partie du bétail humain nommée nation).

Très vite ils étaient des milliers en France et ailleurs à reprendre le fameux : « je suis Charlie » qui répondait au « j’ai tué Charlie ! » lancé juste après le carnage par l’un des tueurs. Mais que veut dire ce slogan au final ? Il s’agit d’un cri de ralliement derrière une République à laquelle on devrait obéir pour qu’en échange elle défende les droits de l’homme, comme la célèbre « liberté d’expression » pour laquelle ces personnes auraient été tuées. Ce slogan est rapidement devenu le symbole de la patrie ayant fait de ses morts des héros, pour lesquels il faudrait observer une minute de silence, la main sur le cœur, dans un sentiment solennel pour lequel nous n’éprouvons, nous, que de l’indifférence. Riches et pauvres, matons et voyous, religieux et athées ont mis de côté leurs différences et se sont attroupés en cortèges serviles pour ne reconnaître que cette effigie, ce mythe qui les fait se croire semblables parce qu’ils vénèrent le même drapeau. Si nous sommes attristés par la mort de ces personnes, elle ne nous touche pas plus que celles des milliers d’anonymes qui périssent loin de nos yeux sous les bombes, par les fusils, aux frontières et dans les prisons des plus grands terroristes au monde qui défilèrent en grande pompe le 11 janvier à Paris, place de la République.

Entre temps il y a aussi eu une prise d’otage dans une épicerie casher au cours de laquelle quatre autres personnes sont mortes. Mais elles, elles n’étaient pas Charlie, ce n’étaient pas des journalistes connus : ce n’étaient que des victimes de plus à rajouter à la liste des atrocités antisémites qui s’allonge depuis des siècles. Le danger des religions est dans leur essence même, dans le principe d’une vérité absolue et aliénante à laquelle on peut tout faire dire. Aussi, pour vaincre celles et ceux qui veulent convertir à coups de kalash, il faudra inciter celles et ceux qui croient en de telles vérités à les remettre en cause car il n’y a rien, dans ce monde ou en dehors, qui puisse nous accorder la liberté. Nous ne voyons pas d’autres manières d’y parvenir que par le combat contre tout ce qui entend nier notre individualité et donner un sens à la vie, contre ceux qui nous font miroiter un paradis en récompense de la soumission et de la résignation.

Nous ne voulons ni la « liberté d’expression » ni la liberté de culte, qui ne sont que des droits accordés par les puissants en échange de notre obéissance. Nous voulons la liberté entière, totale et indivisible. Nous voulons blasphémer contre toute autorité et détruire tous les pouvoirs, qu’ils résident dans les livres sacrés ou aux frontispices des États.

« On nous promet les cieux Nom de Dieu
Pour toute récompense…
Tandis que ces messieurs Nom de Dieu
S’arrondissent la panse Sang Dieu
Nous crevons d’abstinence Nom de Dieu…
Si tu veux être heureux Nom de Dieu
Pends ton propriétaire…
Coupe les curés en deux Nom de Dieu
Fout les églises par terre Sang Dieu
Et l’bon dieu dans la merde Nom de Dieu… »

(La Chanson du Père Duchesne, 1892.)

lucioles.noblogs.org

[Paris] Compte-rendu du procès contre deux compagnon-ne-s arrêté-e-s lors d’une diff’ à Belleville

luluLe 14 janvier 2014 a eu lieu le procès des deux compagnon-ne-s arrêté-e-s le 27 octobre dernier à Belleville pendant une distribution du journal Lucioles n°19 : le motif de l’arrestation était celui d’ »injure publique » liée aux propos du bulletin (plus précisément l’article « Maïs chaud et harcèlement de rue à Belleville »), mais c’est le refus catégorique de donner leurs empreintes et photos qui est resté le seul chef d’inculpation de leur garde-à-vue de 24h suivie d’un déferrement au TGI de Paris. Une garde à vue où les compas n’ont pipé mot bien sûr.

Le procès, qui s’est déroulé sans leur présence, a tourné court puisque le dossier était « vide » (aucune déclaration des inculpé-e-s) et surtout, une bonne chose à savoir, on ne peut pas légalement être condamné pour un refus de signalétique s’il n’y a pas de poursuites pour le délit ayant motivé la prise d’empreintes/photos. Une procédure pour injure publique n’ayant même pas été entamée, juge et procureur étaient donc à l’unisson sur la seule issue possible : la relaxe.

Retenons cependant que les flics ont tout de même essayé de mettre la pression sur les compagnon-ne-s par une garde-à-vue pour une « simple » diff : un moyen pour eux de tenter de décourager ceux qui veulent disséminer la révolte contre la guerre aux pauvres dont ils sont les nervis dans le quartier, à côté de l’autre face de la gentrification : rénovation urbaine, galeries d’artistes, participation citoyenne etc.

Faisons fi des bâtons qu’ils tentent de mettre dans nos roues, continuons à diffuser la guerre sociale !

Quelques contributeur/trices de Lucioles

Publié sur le nouveau blog du journal ‘Lucioles’, 22 janvier 2015