Archives par étiquette : Mexique

[Mexique] Vague de révolte et de pillages suite à la hausse des prix du pétrole

La hausse des prix du pétrole décidée en début d’année par le gouvernement mexicain a provoqué émeutes et pillages spontanés dans tout le pays à partir du début de la semaine dernière.

Des centaines de commerces, dont les plus grandes chaînes commerciales, ont été attaqués dans les principales villes du pays, des autoroutes ont été bloquées ainsi que de nombreux dépôts, centres de traitement et de distribution, qui menaçaient dans la semaine l’approvisionnement dans 3 États du Nord (Durango, Chihuahua et la Basse-Californie, les plus vastes du pays) et l’État de Morelos (sud).
On a aussi vu des des blocages de voies ferroviaires, des attaques de camions citernes, des occupations de stations-service, et des batailles avec les flics, qui ont été repoussés à Ixmiquilpán (État d’Hidalgo, centre) le jeudi 5. Voir à ce sujet la vidéo suivante.

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La déficience de la désobéissance civile en milieux anarchistes

Il y a très certainement plusieurs façons de comprendre la lutte anarchiste : depuis la plus fantaisiste, où les personnes peuvent croire que par le simple fait de désirer la transformation de la société, celle-ci arrivera ; en passant par la vision des « révolutionnaires cybernétiques » qui arrivent à croire qu’en postant la lutte [sur internet] elle se réalisera ; ceux qui assis tranquillement attendent qu’arrivent d’elles-mêmes les conditions pour attaquer, tandis qu’ils « s’endoctrinent » tels de vils religieux ; ceux qui décident de passer à l’action et faire de leur vie l’anarchie même ; et aussi ceux qui pensent pouvoir jouer avec les droits que l’État même leur donne, les anarchistes civiques.

C’est sur ce dernier point que nous nous arrêterons pour réfléchir.
Nous continuons de lire et écouter des compagnons anarchistes qui au sein de leur discours persistent à revendiquer la désobéissance civile comme un acte pour mener le conflit contre le Pouvoir et l’autorité. La plupart du temps parlant de vouloir « les détruire d’un coup à travers des actes de simple désobéissance basée sur leurs droits civiques », ce qui en soi est une contradiction, totalement différent à ce que certains anarchistes entendent par la lutte, ses moyens et ses fins.

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[Mexique] À propos de la candidature zapatiste en 2018 et des anarchistes

1004723_500250456697567_1512046535_nC’est avec peu de surprise que m’est parvenue la nouvelle annonçant que l’EZLN et le Congrès National Indigène (CNI) devraient soumettre une candidature indépendante et indienne pour le scrutin présidentiel de 2018, qui vient confirmer pour la millième fois que les guérillas ne cessent pas d’être ce qu’elles sont : des groupes politiques armés, autoritaires et d’avant-garde pour la prise du pouvoir. Il semble que beaucoup avaient oublié ce fait, certaines tendances de l’« anarchisme » civil ou des libertaires [1] en particulier, même si l’on ne peut reprocher ce fait en lui-même aux guérilleros, puisqu’ils savent jouer le jeu de la politique. Les reproches vont plutôt au manque de clarté et d’analyse chez les anarchistes eux-mêmes. Cela fait déjà longtemps que nous avons observé la manière dont l’EZLN, à la différence d’autres guérillas actuelles comme l’EPR, l’ERPI ou le TDR, a abandonné les nomenclatures prolétaires dix-neuviémistes, pour les transformer en quelque chose de plus moderne mais de même essence. Il ne s’agissait dès lors plus de lutte ouverte contre le capitalisme (même s’ils se déclaraient anticapitalistes) mais contre le néolibéralisme. Il n’y avait plus de prolétaires et de bourgeois mais ceux d’en-bas et ceux d’en haut ; plus de destruction de l’État bourgeois mais la lutte contre le mauvais gouvernement. Ce n’était plus la structure classique du parti de cadres, mais à la place la transformation du Front Zapatiste en individus et collectifs adhérents à la Sexta, soit-disant autonomes, qui appliquaient les ordres du commandement, mais déguisés sous l’argument de la solidarité avec les zapatistes, ses communautés et ses sections en lutte en dehors du Chiapas (la Coordination Nationale des Travailleurs de l’Éducation pour en citer une). Nous avons vu la manière dont ils critiquaient les gouvernants et faisaient la promotion du mandar obedeciendo [« gouverner en obéissant »], et également comme ils mettaient en avant l’ « autonomie » via des ressources obtenues d’organisations civiles et d’ONG. Tout ceci a été avalé par certains anarchistes…mais évidemment pas par tous.
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[Mexique] Sabotage du constructeur de taules ‘Telmex’

Nous voulons communiquer au sujet de la destruction de treize cabines téléphoniques de l’entreprise ‘Telmex’. ‘Telmex’ est une entreprise qui construit des prisons fédérales au Mexique. Carlos Slim, son propiétaire, est un homme d’affaires qui possède aussi d’autres entreprises qui sont impliquées dans la construction de la ligne ferroviaire à grande vitesse entre Mexico et Toluca et qui détruisent quantité de forêts et de nappes phréatiques. Ces actes de sabotage se sont déroulés dans la nuit du 17 juin dans la ville de Nezahualcóyotl au Mexique.

Ce sabotage est fait en solidarité avec les prisonniers qui se sont révoltés dans la prison de Barrientos. C’est en soutien aux compagnons qui sont en cavale au Mexique: Chivo, Tripa et  “Cobi”; pour le compa Gustavo R. et pour la destruction des prisons.

Feu aux entreprises qui construisent des prisons.

Des anarchistes.

Communiqué reçu le 19 juin 2016 / Traduit de l’espagnol de contrainfo

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[Mexique] Lancement du site de la revue ‘Negacion’

Lancement du site de la revue ‘Negacion’ (Mexique), avec en plus un supplément : « Suplemento Revista Negación #7 Dossier sobre la militarización en Francia y Bélgica, y el antagonismo ante el estado de emergencia »

revistanegacion.espivblogs.net

[International] Nouvelles d’opposition du mois de novembre

Voici un lien vers les Nouvelles d’opposition qu’on a trouvé pour le mois de novembre, si possible agrémentées de commentaires pour celles sur lesquelles nous possédons des éléments.

Avec entre autres :

-Pas mal de choses du côté du Mexique et de l’Afrique du Sud (comme d’habitude)
-de l’agitation en prison (grève de la faim d’un anarchiste turc et du condamné à mort américain Keith Lamar, plusieurs échauffourées dans l’Alabama, une émeute en Guinée…)
-un soulèvement au Togo
-toujours des émeutes et actions contre la police (Égypte, États-Unis, Zimbabwe)
-des mouvements violents contre des grands projets (Indonésie)
-des mouvement de migrants et contre les centres de rétention (Angleterre, Calais, Turin, ,Chypre, Macédoine, Australie)
-des mouvements paysans (Colombie, Grèce, Canada)
-des attaques ciblées (contre Syriza en Grèce, l’armée en Belgique)
-une grève générale doit on a très peu parlé à Mayotte
-d’autres grèves importantes (Grèce, aéronautique au Brésil)

[Reçu par mail]

[Mexique] Ne pas oublier les massacres d’Etat passe par l’émeute – 2 octobre 2015

Vendredi 2 octobre avait lieu dans plusieurs villes du Mexique de nombreuses manifestations pour commémorer le massacre de centaines d’étudiants par l’armée le 2 octobre 1968 à Tlatelolco, la veille des jeux olympiques de Mexico. A cela s’est ajouté l’anniversaire des 43 étudiants d’Ayotzinapa disparus (au moins 6 morts et 23 blessés retrouvés) dans l’Etat de Guerrero l’an passé.

"Ni pardon ni oubli - Mort à l'Etat" - Mexico, 2 octobre 2015

« Ni pardon ni oubli – Mort à l’Etat » – Mexico, 2 octobre 2015

A Mexico et à Oaxaca, les manifestations ont débouché sur une conflictualité incendiaire envers l’Etat: à Mexico, 5000 policiers étaient mobilisés. Entre 100 et 300 encapuchados, qui répondaient à l’appel à la manif « 2 octobre, on n’oublie pas », ont attaqué avec de pierres et des cocktails molotov les flics qui protégeaient les environs du Palais National à Zócalo. Les affrontements ont duré que quelques minutes. Il y a eu entre 3 et 10 interpellations selon les médias du pays. A Oaxaca, plusieurs banques (notamment une agence ‘Santander’ et une succursale ‘Banorte’), au moins deux concessionnaires automobiles (dont un de ‘Mazda’ et l’autre de ‘GMC’) et leurs voitures exposées ont été attaqués. Des magasins ont également eu leurs vitres détruites. Un magasin de bouffe a été pillé. Environ 53 émeutiers présumés (dont 10 mineurs et femmes) ont été interpellés à Oaxaca. La plupart font l’objet de poursuites pour « actes de vandalisme, tags sur bâtiments publics, agences commerciales, monuments historiques, etc… »

Mexico

Mexico

La banque 'Santander' de Oaxaca prise pour cible

La banque ‘Santander’ de Oaxaca prise pour cible

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idem

Passage au concessionnaire 'Mazda'

Passage au concessionnaire ‘Mazda’

idem

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Self-service, sans passer par la caisse...

Self-service, sans passer par la caisse…

Mardi 22 septembre, des protestations étudiantes avaient eu lieu dans l’Etat de Guerrero. Alors que des étudiants et parents s’apprêtaient à monter dans une dizaine de bus afin de rejoindre la manifestation à Chilpancingo (la capitale), les flics ont eu la mauvaise initiative d’intervenir en bloquant l’accès routier de Tixtla à la capitale d’Etat : à la suite de quelques vaines tentatives de parents d’élèves de négociers l’accès auprès des flics, près de 200 jeunes masqués ont lancé des molotovs et pétards sur les 200 flics qui bloquaient l’accès. Les affrontements ont laissé cinq agents de l’Etat en mauvais état (« traumatismes crâniens, plaies et contusions ») et deux jeunes manifestant-es blessé-es. La veille au soir, les bureaux du procureur (« La Fiscalia ») à Chilpancingo ont été attaqués et saccagés par un groupe de jeunes encapuchados.

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[Reformulé de la presse mexicaine, 22/09 et 02 & 03/10/2015]

[Mexique] Les récupérateurs de l’existant

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Negacion – 2015 – Mexique

Dans le deuxième numéro de cette publication [Negaciòn], nous avons déjà écrit sur le rôle d’intégration dans le système que jouent aussi bien des ONG que divers groupes de gauche et réformistes afin de pacifier des soulèvements et des conflits en assimilant différentes luttes qu’ils dépossèdent de caractéristiques essentielles qu’elles étaient parvenues à acquérir ponctuellement. Nous avons déjà dit que c’est ainsi que le système, au travers de ses programmes d’accompagnement social citoyen intègre dans ses rangs des groupes susceptibles de représenter à l’avenir un danger pour la paix sociale ou la stabilité du pays. Aux cotés des institutions, différents collectifs du spectre de la gauche participent à ce rôle de récupération.

Ce que nous appelons « récupération » est constitué par tout un ensemble : lorsqu’une lutte tendant à se radicaliser se voit intégrée dans le système par des groupes de gauche et d’ONG ; ou alors quand l’État se charge lui-même de cette tâche en utilisant ses propres moyens pour récupérer ces luttes et les placer sous son contrôle, sa surveillance, sa conduite. Cela se produit aussi quand des groupes gauchistes cherchent à prendre part à des luttes conflictuelles en venant y proposer des réformes et des médiations avec l’État et en les rendant ainsi vulnérables au contrôle du système. Il est évident mais nécessaire de souligner que les troupes de choc de l’État jouent un rôle important dans ce processus de récupération et/ou d’assimilation qui suivent les soulèvements ou révoltes. Je citerai quelques exemples pour illustrer le sujet.

Les poussées insurrectionnelles du 1er décembre 2012 ont vu des milliers de personnes prendre les rues de Mexico pour protester contre l’investiture du gouvernement de Enrique Peña Nieto. Les groupes de gauche démocratique, les partis politiques de gauche, des groupes antisystème (y compris la FAM [1]) ainsi que des groupes d’ « intégrateurs » bien connus et de réformistes à outrance telle qu’une bonne partie du mouvement « Yo soy #132 » [2] sont aussi sortis dans la rue, mais toujours avec la devise -parfois de manière indirecte- d’éteindre toute poussée insurrectionnelle et de gérer la révolte tout en apportant de l’eau à leur moulin.

Malheureusement pour eux, les troubles ont pris à ce moment la forme de la révolte ; l’attaque des symboles du pouvoir et l’auto-organisation ont commencé à se propager et les anarchistes sans drapeau, sigles ni organisation formalisée se sont aussi retrouvés aux côtés des autres exploités pour auto-organiser la révolte. C’est cette auto-organisation qui a permis de dépasser les mots d’ordre appelant au « calme » provenant de divers groupes de gauche qui voyaient le contrôle leur échapper manifestement des mains. Quelques collectifs anarchistes ont éprouvé la même chose en constatant que dans ce moment insurrectionnel leur organisation de synthèse ne dirigeait ni ne représentait rien, comme ça avait été le cas en 1936 ou en 1910, que le chaos s’était généralisé et que l’autonomie des exploités, exclus et auto-exclus avait dépassé leurs vieux mots d’ordre, leurs vieux schémas et leurs éminents appels réitérés à l’attente et à l’ »organisation telle qu’il se doit ». Cela s’est confirmé par la suite lorsque les mêmes dirigeants de l’Alliance Anarchiste Révolutionnaire, adhérant à la FAM, ont nié la participation des acrates aux émeutes.

Le premier décembre 2012, la révolte a surgi. Après les émeutes au cours desquelles plusieurs sièges du capital ont été sabotés et de nombreux affrontements ont eu lieu avec la police, des centaines de personnes ont été arrêtées, la plupart provenant de la sphère de gauche et anarchiste. Les habituelles violations des dits droits de l’homme se sont produites et des « condamnations excessives » sont tombées sur les arrêtés. La plupart d’entre eux ont été accusés d’attaques à la paix publique, délit de droit commun qui peut être puni par jusqu’à 36 ans de prison.

A ce moment, le mot d’ordre -particulièrement du mouvement #132- a consisté à réclamer la dérogation de ce délit, qualifié d’anticonstitutionnel et sans fondement juridique. Ce mot d’ordre a conduit à mobiliser des centaines de personnes, des groupes de gauche et d’autres collectifs anti-système, jusqu’à quelque secteur anarchiste.
Quelques semaines plus tard, le 28 décembre précisément, l’assemblée législative du District Fédéral a modifié le délit d’attaque à la paix publique pour le faire passer à un délit sans gravité offrant des possibilités de caution et c’est ainsi que toutes les personnes arrêtées sont sorties, mais en attente de jugement. On a dit beaucoup de choses sur cette réforme. Le #132 s’en est vanté avec ses suiveurs, faisant de ce « changement » une « réussite », un triomphe du peuple et du mouvement social. Pourtant, même si les mobilisations réclamant la dérogation de cette loi avaient exercée une pression minime, nous voyons clairement que la stratégie du gouvernement a répondu à autre chose.

En même temps que ce scénario d’émeutes, de molotov, de mobilisations, d’arrestations et de torture contre les manifestants, le changement de gouvernement a eu lieu dans le District fédéral. Marcelo Ebrad laissait le pouvoir et son successeur – en plus d’être l’ancien procureur de justice de la capitale- policier de l’académie, le docteur Miguel Mancera allait occuper la charge de Gouverneur de la capitale. Ni Ebrad ni Mancera, tous deux de gauche et sociaux-démocrates aussi cupides que progressistes, ne pouvaient partir ou arriver en étant entachés de sang, de discrédit, de tortures et d’arrestations arbitraires ; pas plus d’ailleurs que d’émeutes ou d’encagoulés, armes que leurs adversaires politiques utiliseraient pour leur faire une « mauvaise publicité ».

C’est ainsi que la loi d’attaques à la paix publique a été réformée, un ordre qui à notre avis a été de caractère politique comme réponse à la crise du moment.

A la décision de réformer la loi comme stratégie politique pour s’en tirer plus ou moins « bien » face aux habitants de la capitale, nous pouvons ajouter le fait que cette concession du gouvernement de la ville visait à calmer les esprits chauds des protestataires qui auraient pu en venir au mot d’ordre suivant : libérer les prisonniers politiques. La récupération fait aussi parti de ces intentions. Que ce soit directement ou pas, suite à une stratégie ou par coïncidence, le gouvernement de la capitale est sorti gagnant au moment où la gauche progressiste, les réformistes et particulièrement des groupes comme Yo soy #132 ont célébré cette concession comme une « réussite » et l’ont prise comme une avancée dans la « démocratie du pays », peut-être sans vouloir voir que ça n’était qu’un maillon supplémentaire à la chaine que porte les prolétaires.

Le gouvernement a gagné, puisque cette « réussite » a impliqué la médiation, l’accord et la pacification. Yo soy #132 et le dit « mouvement social » sont passés au silence, à la délégation, au dialogue et à l’accommodement. Le « slogan » de dégager Peña Nieto – bien que fort discutable d’un point de vue anarchiste – qui était parvenu à un moment à faire prendre le mécontentement et avait culminé par de grosses émeutes susceptibles de l’étendre, s’est retrouvé réduit à un tas de pétitions et à la célébration d’un jour de plus sur le calendrier révolutionnaire.

Les groupes de gauche se sont réarrangés, chacun d’entre eux a tiré parti de ce soulèvement et de nombreuses choses sont revenues à la normale. Tous contents avec leur réforme misérable.

Tous contents avec une nouvelle journée à fêter, en espérant que l’année prochaine soit similaire. Les autres récupérateurs ont aussi fait leur boulot – y compris les politiciens de la FAM et d’autres groupes de la même ligne qui ont cherché à profiter de l’occasion- en essayant à tout prix d’inclure les groupes dissidents dans leurs organisations, en continuant d’appeler au calme et à l’attente, en intégrant divers secteurs en lutte dans les jeux du système, dans les programmes sociaux, dans les partis politiques, en traitant les insurgés de vandales, et particulièrement les individualités anarchistes et antisystémiques ayant participé à ces journées de soulèvement populaire. Travail bien fait pour l’intégration – et en quelque sorte pour la canalisation de rebellions et de nouvelles poussées de violence- qui portera ces fruits lors des manifestations suivantes beaucoup moins nombreuses et incontrôlées.

Mais pourquoi ce travail de récupération ?

Simplement parce que ces révoltes qui à un moment criaient le seul mot d’ordre contre l’investiture au gouvernement du dinosaure du PRI ont dépassé non seulement les demandes et les programmes de ces groupes, mais aussi les propres mots d’ordre qu’elles s’étaient donnés. Celle du 1er décembre n’a pas été une révolte contre Peña ni contre le PRI ; même si elle a commencé ainsi, a posteriori dans ces moments de chaos spontané, la phase revendicative habituelle a été dépassée, cette phase revendicative qui stagne, est si facilement récupérable par les réformistes et les partis politiques d’ « opposition » et finit toujours par assassiner les passions de vivre une vie qui vaille la peine. La révolte du 1er décembre a uni la rage des exploités contre ce système d’exploitation, c’est-à-dire contre ce monde et ceux qui l’administrent. Nous avons alors été quelques-uns à questionner l’attitude de nombreux anarchistes qui au cours des émeutes répétaient avec ferveur les consignes répandues, réformistes et contre le PRI, comme si leur participation s’accompagnait d’un manque de perspective et d’un projet clair d’insurrection. Non pas d’une insurrection précisément anarchiste, car elle ne l’était pas, mais d’un projet insurrectionnel tendant à intervenir de manière claire non seulement pour que la révolte se généralise quant à la violence révolutionnaire mais aussi pour que la critique sur les conditions d’exploitation et de mort s’étende à une critique plus générale et donc globale. Une telle généralisation de la critique et de l’attaque ne sera pas donnée par un programme établi au préalable, pas plus qu’avec quelques consignes apocalyptiques – bien que soient nécessaires certaines bases desquelles partir -, mais viendra plutôt du processus même d’auto-organisation des exploités. Avoir une incidence est très différent d’imposer. Et malgré tout de nombreux compagnons y étaient prêts, avec le désir de détruire le présent et d’intervenir pour généraliser le conflit dans toute sa splendeur.

Participer à une révolte populaire ne signifie pas répéter aveuglément les slogans du « peuple » ni les programmes des mouvements sociaux établis. Ces délégations de notre individualité ne nous intéressent pas. Participer à une révolte populaire signifie avant tout un point de rencontre en commun entre individus, c’est proposer une perspective d’un monde nouveau, d’un monde libre de toute autorité ; c’est créer ses propres consignes avec les autres exploités, sans suivre de programmes ni de leaders. Participer à une révolte populaire ne consiste pas à se martyriser pour « la cause du peuple », c’est s’auto-organiser avec les autres, discuter, débattre pour arriver à des points en commun. Participer à une révolte populaire c’est être participants à la première personne et non pas agir comme des moutons qu’on entraine sous des schémas étrangers; c’est avant tout influer sur le cours des choses pour que les motivations de la révoltes et celle-ci même se radicalisent.

L’année 2013 a été une époque de tensions dans la capitale du pays puant; avec la hausse des tarifs du métro, l’auto-organisation des exploités et des opprimés a de nouveau ressurgi démontrant que tout n’avait pas été vilement assimilé et récupéré par l’État.

Des manifestations massives dans la rue, les blocages aux entrées principales du métro, des sabotages aux distributeurs de tickets, des affrontements répétés avec les forces de l’ordre, un climat qui sentait la tension et la poudre. Dans ce contexte, une action contre le STC (Secrétariat des Communications et des Transports) a tenté de propager la reproductibilité et la réappropriation d’actes simples de sabotage. Cette action -comme beaucoup d’autres- a tenté d’apporter sa contribution à une nouvelle généralisation du conflit. Au cours de ces semaines de tension, la rage était auto-organisée, mais aussi spontanée. Un exemple, aussi simple que clair, en a été les centaines de sabotages sur les distributeurs de tickets du métro et le connu « boletazo » [3]. Cela a montré clairement que le sabotage, l’action directe, l’auto-organisation, l’autogestion de la lutte ne sont l’exclusivité d’aucun groupe de spécialistes, et encore moins de politiciens professionnels et de dirigeants. Ce sont avant tout des armes à la portée de tous.

Ce qui a mis un terme à ces semaines de rébellion, a été de nouveau la concession qu’a fait le GDF avec le tarif spécial accordé aux personnes vulnérables, femmes au foyer, étudiants, chômeurs etc. En parvenant à un accord et à la pacification des expressions de révolte qui s’étaient manifestées au cours de ces semaines.

Pour conclure, je dirai que par ailleurs nous avons aussi été responsables de ce qui s’est passé de par nos tiédeurs à l’heure de critiquer de manière perspicace et objective, mais aussi forte et sans médiation ce genre d’organisations récupératrices et gauchistes qui semblent « jouer à la révolution », indépendamment du fait qu’elles travaillent directement avec l’État ou pas et même qu’elles soient anarchistes. Ce manque de caractère critique est en partie ce qui a permis l’avancée de l’oeuvre de récupération et d’intégration de cette sorte d’organisations dont nous savons bien qu’elles ne vont pas céder par une simple critique de leur boulot. Cependant si celle-ci peut éventuellement influer sur la perspective dont les compagnons et d’autres les envisagent, elle peut même retourner le climat d’ »acceptation » existant autour de ces organisations récupératrices de l’existant.

Que dire de l’année 2014 [4] ? Toutes les protestations, les actions et les émeutes dus à la disparition des 43 élèves de Iguala, mais aussi celles visant à la destruction de l’Etat-Capital ont montré que la rage continue sur sa lancée, que la pacification sociale n’a pas atteint les sommets espérés, que cette année les énergies ne vont pas retomber, au contraire. Comme toujours, les conditions sont sur la table. De toute manière, dans ce climat de tension dans la capitale du pays, les récupérateurs de tout poil ont été présents, faisant tout leur possible pour éteindre le feu. Mais contrairement à ce qui a été écrit quelques paragraphes auparavant, j’oserai demander : ont-ils bien fait leur travail ? Peut-être que oui, mais seulement pour l’instant, nous verrons à l’avenir.

Par un insurgé sans velléités de repentir

Notes

1. Federación Anarquista Mexicana

2. Le mouvement Yo soy #132 a été un mouvement politique et étudiant ouvertement réformiste dont la première génération a vu le jour dans l’université privée IBERO, au moment où un groupe d’étudiants manifestait contre le meeting célébré par Enrique Peña Nieto dans cette université dans le cadre de sa campagne présidentielle pour le compte du PRI (Partido Revolucionario Institucional). A ses début, le mouvement #132 avait une nette teinte social-démocrate (influence du PRD, Partido de la Revolución Democrática), mais avec le temps, de nombreuses scissions en son sein ont opté pour un gauchisme plus militant. Certains comparent ce mouvement à celui dirigé par l’étudiante chilienne Camila Vallejo. Il existe un livre sur le #132 qui à nos yeux ne représente rien d’autre que la mythification de ce mouvement.

3. Le blockage ou sabotage des portiques de métro afin que les gens puissent entrer sans payer (NdT).

4. Je recommande la lecture du texte « Conflicto, la disgregacion y la guerra social ».

Publié sans la revue ‘Avalanche’ n°5, Juillet 2015

[Veracruz, Mexique] Attaque incendiaire d’un concessionnaire ‘Toyota’ – 25 juin 2015

« Le progrès, la technologie et la civilisation nous obligent à faire la guerre ici et maintenant contre toute domination et ses tentacules qui nous baîllonnent. »

toyota-dealership-burned-in-qingdaoAux premières heures du 25 juin 2015, nous avons fait exploser un engin incendiaire dans un concessionnaire Toyota situé avenue Vallejo en se moquant de ses mesures de sécurité et en esquivant son système de patrouille et repèrant ses caméras-espion, montrant que la guerre se déroule ici et maintenant, que que ce ne sont ni toutes ses caméras, patrouilles, balles et tout ce qui sert à contrecarrer notre action sont inutiles, Bien que chaque rue soit surveillée par des caméras installées en masse et même si leurs sbires sont déployés partout dans le pays, nous continuons à attaquer, à gagner du terrain à pas de géant contre la domination.

Nous revendiquons cette action au nom de chaque compagnon assassiné, séquestré, menacé, torturé, emprisonné et poursuivi au Mexique et dans le monde pour leur faire comprendre que chaque balle va revenir, que même s’ils nous tuent ou nous enferment, ils devraient garder à l’esprit qu’ils encourent le même sort. Pour chaque compagnon assassiné, nous en tuerons mille de plus que vous. Ils disent que le Juin Noir s’est terminé le 7, nous disons que ça se termine ni le 7, ni aucun autre mois ou jour et que c’est un appel à continuer la guerre permanente.

Contre leur technologie et ses moyens qui intoxiquent et assassinent la nature sauvage !

Pas seulement en juin, mais pour une guerre noire permanente !

Feu à la civilisation !

Nous saluons également les compagnon.ne.s en cavale Felicity, Chivo, Tripa – Depuis la clandestinité, la guerre continue ! Nous envoyons aussi une chaleureuse accolade aux grévistes de la faim de la coordination informelle de prisonniers, sachez compas qu’il est possible d’entreprendre la fuite, la santé et la liberté des prisonniers de toute horizon !

 Traduit de contrainfo, 22 Julio 2015

[Mexique] Interventions anarchistes sur fond de protestations incendiaires anti-électorales

Interventions anarchistes

Dans un communiqué du 1er juin titré « A provocar el Junio Negro«  (lire ici), des anarchistes ont revendiqué trois attaques explosives coordonnées à base de poudre noire/tubes/détonateur ce même jour dans la ville de Puebla (à 110 km au sud-est de Mexico, c’est la 4e plus grande ville du pays) : contre le Secrétariat à l’Economie, contre l’Instituto Nacional Electoral et contre la gare routière située près l’Université Technologique.
Leur texte dit notamment : « Pour tout cela et bien plus, boycott électoral. Pour tout cela et bien plus, feu à l’Etat capital. Pour l’autonomie, l’autogestion et l’insurrection généralisée. Mort au système-monde« .

Le secrétariat de l'économie

Le secrétariat de l’économie

La station 'université' de la gare routière à Puebla

L’Institut National Electoral

La station 'université' de la gare routière à Puebla

La station ‘université’ de la gare routière à Puebla

Le 6 juin, à travers un communiqué, c’est le Comando feminista informal de acción antiautoritaria qui revendiquait pour sa part l’attaque explosive à base de dynamite qui s’est produite vers 3h du matin contre les bureaux de la SEDATU (Secrétariat du Développement Agricole, Territorial et Urbain) à Mexico, District Fédéral. Il se terminait par « Ne vote pas. Tue-les tous«  (lire ici).

Les bureaux de la SEDATU

Les bureaux de la SEDATU

Lire un résumé complet des protestations incendiaires contre les élections à travers le Mexique

Dans la nuit du 12 juin 2015 dans la ville de Mexico, l’agence bancaire ‘Banamex’ de l’avenue Sullivan a été carbonisée à la suite d’une attaque explosive.