Que de bonnes raisons d’attaquer les entreprises qui collaborent à l’enfermement

feualamaxiprisonLa prison resterait un rêve dans la tête des dominants si elle n’était pas concrétisée par le travail des uns et le renoncement des autres. Aujourd’hui comme hier, pour mener à bien ses projets, le pouvoir doit s’assurer le concours de ceux-là même qui en sont les victimes. La maxi-prison n’échappe pas à la règle. Ici, pour nous obliger à faire ce qu’ils veulent (nous domestiquer), les gouvernants s’y prennent de deux manières. D’une part, ils s’acharnent à faire accepter collectivement la fausse nécessité de leur projet. Notre consentement (qu’on soit favorable ou résigné) est en effet la condition sine qua non. À vrai dire, la décision de ne pas s’y opposer est la fondation première sur laquelle s’élèvent et reposent tous les édifices de l’exploitation. Là réside aussi leur vulnérabilité !

D’autre part, avec le salariat, les dominants s’assurent la force physique et intellectuelle des exploités pour mettre en œuvre leur projet. Aucune structure de pouvoir ne peut exister sans le tour de force du salariat. Et pour que l’esclave n’ait pas conscience de construire sa propre cage, pour occulter le fait concret de la domestication, l’Etat dispose mille trompe-l’oeil devant la réalité. À l’image du projet de maxi-prison, où l’exploitation par le travail se fond derrière des « partenaires privés », des « métiers de spécialités », des « directions déléguées », … qui agissent comme autant de paravents qui masquent les rapports de pouvoir. Ne nous y trompons pas. Les entreprises collabos sont un amalgame de patrons, d’autorités et de têtes pensantes qui bâtissent leur domination avec les chaînes du travail et de l’enfermement.

Si la prison voit le jour, si la prison perdure, c’est que ceux d’en bas y travaillent ou s’y résignent. Mais si on rompt le cours des choses, si les dominants perdent le concours des exploités : leur rêve de prisons resterait dans les songes… une bonne fois pour toute !

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Le fait est qu’on peut détruire les prisons en attaquant les personnes et les choses qui les font exister. L’engrenage de la machine est parfois plus simple qu’on pense et gripper son mécanisme ne demande qu’un peu de fantaisie, d’initiative et de constance. Comme souvent, une recherche minutieuse d’informations est le premier pas pour se libérer de la confusion et passer à l’action. À bien décortiquer la prison, on s’aperçoit que les rouages dérobent au premier regard une facette économique fondamentale. Pour être concret, l’enfermement prend racine dans un tissu d’entreprises diversifiées, qui, pour les trouver, demandent de porter son regard bien au-delà des barbelés et des miradors. Il y a les bureaux d’architectes et d’ingénieurs, les constructeurs, les agences de financement, les prestataires de services… Outre les gens qui y travaillent, ces entreprises sont aussi toutes les « choses » dont elles dépendent pour concevoir, construire, gérer et entretenir les taules. Il y a les chantiers, dépôts, véhicules, installations, machines… la liste est encore longue et les manières de les attaquer n’ont d’autres limites que notre imagination. Les responsables ont un nom, un visage, une adresse… Le matériel se grippe, explose, s’enflamme… La prison est l’ensemble de tous ces aspects articulés, ou elle n’est plus.

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N’oublions pas que le projet de maxi-prison joue un rôle clé dans le contrôle social des exploités à Bruxelles. Il est un organe vital, sinon inséparable, du grand corps répressif qui doit nous emprisonner au quotidien. Gestion du territoire. Transports militarisés. Police permanente. Inspection administrative. Règlements publics. Surveillance. Contrôle. Vu de plus haut, le projet de maxi-prison est incontournable, en cela que le pouvoir dépend de la maxi-prison pour rendre possible toutes les violences de l’ordre social. Mais sous le calme apparent des subordinations, la rage couve. Une rage qui peut exploser à tout moment de manière coordonnée et diffuse, en contaminant partout les désirs de révolte, pour balayer violemment les projets du pouvoir. L’erreur consiste à attendre patiemment un jour particulier qui peut-être viendrait mettre le feu aux poudres… Le moment de l’attaque c’est tout le temps ! Le piège consiste à vouloir confier cette lutte à d’autres…

Le combat doit partir de nous-mêmes ! À nous maintenant d’opposer notre désaccord en actes partout où le pouvoir cherche à s’imposer. Contre la prison et son monde.

Tiré de ‘Ricochets’ n°10 via la cavale