Archives quotidiennes :

[Angleterre] Sans-papiers en lutte au centre de rétention pour femmes de ‘Yarl’s Wood’

Les femmes détenues dans le centre de rétention de ‘Yarl’s wood’ protestent depuis ce matin 7 septembre 2015 pour leur libération. La prison pour migrants a connu un printemps agité avec des grèves de la faim de masse et des manifestations en Mars, la résistance aux expulsions en Avril [1], et des clôtures démolies en Juin [2].

Ces citations de l’action de ce 7 septembre sont du blog Voices detained (où vous pouvez trouver des mises à jour régulières):

« Nous sommes dans la cour, nous protestons. Nous sommes ici depuis plus d’une heure depuis 09h00. Il y a trente d’entre nous. Nous exigeons notre liberté. Nous chantons pour notre liberté. Nous crions. Nous chantons « Liberté, liberté, liberté, nous voulons notre propre liberté » ».

« Ils tiennent encore très fortement. Nous sommes presque cinquante. Nous chantons et dansons. Nous nous tenons chaud car il fait un peu froid … Nous prévoyons de rester ici jusqu’à 21 heures. Nous ne mangeons pas. Nous ne faisons rien. Nous ne voulons pas de leur nourriture. Nous ne voulons pas de leurs activités. Nous voulons simplement notre liberté. »

« Il y a trois officiers qui arrivent pour choper une des femmes dans la cour. Ils veulent l’emmener à l’aéroport. Des femmes l’entourent afin qu’ils ne puissent pas la bouger. Ils veulent toujours la prendre, mais beaucoup d’entre nous l’entourent. Un des officiers nous intimide et appelle à davantage de renforts ».

« Nous chantions dehors, en criant dans la cour pour la liberté et une femme s’est effondrée juste à ce moment. Nous avons appelé les officiers et les infirmières sont venus et l’ont mise sur un fauteuil roulant alors qu’elle était encore inconsciente. Ils l’ont manipulé, ils l’ont emmenée sur le fauteuil roulant alors qu’elle était encore inconsciente. Ils devraient avoir une civière. Elle respirait. Elle a été emmenée mais nous sommes toujours dans la cour. Nous avons manqué l’appel. Il y a environ 50 femmes qui sont toujours ici. »

« Nous sommes restées dehors jusqu’à quasiment 2h du matin. Ils étaient occupés à nous compter à l’extérieur. Ils nous ont prié de rentrer mais nous ne l’avons pas fait. Ils ont voulu nous compter à l’intérieur mais ils ont dû nous compter à l’extérieur. Nous nous mélangions de sorte qu’ils continuent à perdre leur décompte. Ils voulaient que nous restions immobiles. Ils doivent arrêter de nous compter, nous sommes des êtres humains. Vous n’êtes pas censés nous compter. Nous n’avons pas mangé. La plupart d’entre nous n’y sommes pas allées. A midi nous sommes retournées dehors. Nous serons là. »

« Une des femmes s’est évanouie à 10 heures et ils l’ont emmenée à l’infirmerie. Elle est de retour dans sa chambre maintenant. L’infirmière est venue pour vérifier s’occuper d’elle ce matin. Elle ne peut pas se rappeler ce qui est arrivé hier. Elle ne peut pas parler, elle est confuse. La femme est malade, elle est fatiguée. Elle est là, elle ne peut même pas marcher. Nous devons la soutenir. Pourquoi c’est comme ça ?

NdT:

[1] Jeudi 9 avril 2015, plusieurs retenues empêchent physiquement l’expulsion d’une femme vers le Kenya (elle s’appelle Lucy N). Dans l’après-midi du 17 avril, 30 molosses de l’entreprise SERCO (gestionnaire du centre) armés de matraques et en tenue anti-émeute débarquent dans sa « chambre » pour l’expulser de nouveau. Il y a trois gardiens pour chaque femme. Anna, Lillija et quatre autres femmes (reconnues d’avoir résisté avec succès à l’expulsion) se font menotter et emmenées dans l’aile d’isolement « Kingfisher », où elles y resteront séquestrées une semaine. Lors de cette nouvelle tentative d’expulsion, Anna et Lillija se font sévèrement tabasser par un des matons de SERCO, Jo Singh. Celui-ci avait déjà été reconnu responsable par le passé de plusieurs tabassages selon les femmes du centre. Anna a du être hospitalisée le lendemain à Bedford pour des coups reçus à une jambe.
En fin de compte, Lucy N. n’a pas été expulsée vers le Nigéria. Mais Anna et Lillija, toutes deux russes originaires de Lituanie (vivant en Angleterre depuis de nombreuses années et condamnées pour plusieurs vols à l’étalage), ont payé lourdement leurs actes d’insoumission et de dignité face aux chiens de Serco. L’entreprise et le ministère de l’intérieur ont décidé de les renvoyer en prison.

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[2] Samedi 6 juin, plusieurs centaines de personnes ont manifesté de manière déterminée en solidarité avec les migrantes du centre de rétention pour femmes de ‘Yarl’s Wood’ dans le Bedfordshire, géré par l’entreprise SERCO.

Durant la manif, les discours des politiciens et célébrités ont été clairement ignorés et une grande partie de la foule a décidé d’aller démolir la clôture du périmètre extérieur. Après l’avoir fait tomber, elle s’est attaquée à la clôture intérieure, qui était davantage solide et qui n’a pas été abattue. Des dialogues ont pu être établis avec les prisonnières sans-papiers. Des cris ont pu être entendus depuis le centre, tout comme le vacarme des coups sur les fenêtres. Il y avait trop peu de flics pour empêcher ses échanges de solidarité.

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[Valence, Espagne] De la tentative d’évasion à l’émeute au CIE – 8 septembre 2015

NINIDans la nuit de dimanche 7 au lundi 8 septembre, une tentative d’évasion a tourné à la révolte collective contre les flics et le personnel du Centre d’Internement pour Etrangers (CIE) de Valence. Tout serait parti d’une tentative d’évasion de cinq migrants qui se sont rués sur deux agents de sécurité.

Vers 23h30 dimanche, plusieurs sans-papiers détenus ont tenté de s’évader de l’enfer carcéral et des conditions merdiques qu’ils subissent (en l’occurrence le manque de toilettes dans les cellules*). Un migrant a réussi à arracher un trousseau de clés des mains d’un des flics – qui au passage s’est mangé des coups dans la gueule – et d’accéder au toit de la prison. De là, un groupe de migrants a attaqué les flics à l’aide de pierres et de branches d’arbres longues d’un mètre environ. Les flics suréquipés ont répliqué par des tirs de balles en caoutchouc. Ils ont appelé de nombreux renforts anti-émeute (dont l’Unité d’Intervention de la Police, UIP) dès que la situation était hors de contrôle.

A l’intérieur du centre, des sans-papiers ont foutu le feu à leurs matelas, utilisé des extincteurs en direction des flics et provoqué de nombreux dégâts matériels. Les pompiers sont rapidement intervenus et les migrants ont réintégré le centre aux alentours d’une heure du matin. Cette révolte a laissé cinq flics blessés d’après la presse espagnole. 54 sans-papiers auraient participé à l’émeute.

En septembre 2014, plusieurs sans-papiers s’étaient évadés lors d’une révolte similaire dans ce même centre.

Solidarité dans la révolte, avec ou sans-papiers !

NdT :
*D’après l’organisation citoyenne « CIEs NO » (partis de gauche en campagne pour demander au pouvoir de fermer les centres de rétention), qui a émis des critiques sur les conditions de rétention des migrants. Une de ses porte-paroles, Ana Fornés, récupère la révolte des migrants en évoquant les conditions « insalubres » de ce centre. Selon elle et ses acolytes, cette révolte s’adresserait au pouvoir pour « attirer l’attention sur leur situation et les conditions dans le CIE, qui sont très difficiles ». Le problème ne serait donc pas l’enfermement et le contrôle en général ni même les expulsions, les frontières, etc… mais seulement un souci d’infrastructures vêtustes qui « bafoueraient les droits humains » et favoriseraient d’éventuelles émeutes. Pour elle, comme pour le maire de Valence et la Croix-Rouge, il s’agit de faire campagne pour la fermeture de ce CIE, dans lequel 75 migrants, la plupart originaires du maghreb, sont séquestrés avant d’être expulsés.

Valencia