[Australie] Guerre aux riches à ‘Footscray’, quartier ouest de Melbourne

Vitrines fracassées, tags insultants… plusieurs établissements de Melbourne, en Australie, ont été victimes de vandalisme. En cause : leur affiliation supposée à la “sphère hipster”. 

Une “guerre anti-hipster” : le quotidien local The Age ne mâche pas ses mots. À la lumière des multiples actes de vandalisme subis par plusieurs établissements du quartier de Footscray, une vague d’inquiétude et d’incompréhension monte chez les commerçants. Ces attaques sont en effet ostensiblement dirigées contre ceux que les agresseurs considèrent comme des “hipsters”, un terme assez flou désignant tout individu attaché aux tendances (musicales, vestimentaires, etc.) de niche.

Dernièrement, les agressions se sont multipliées : slogans insultants, menaces, portes collées à la glu, vitres brisées, entrées par effraction… parsèment la liste de ce qu’ont eu à subir quatre établissements de ce quartier populaire de l’ouest de Melbourne. La dernière date d’aujourd’hui-même, alors qu’un sac de viande pourrie a été jeté sur la vitrine d’un café. Juste avant cela, c’est le propriétaire d’un restaurant de burgers [le « 8-Bit Burger » situé sur la ‘Droop street’, Ndt] qui a vu sa vitrine cassée [16 vitres en tout, Ndt] et taguée d’un subtil : “Allez vous faire foutre, ordures de hipsters.” […]

Au centre du mécontentement de cette minorité violente : les changements récents que connaît Footscray, avec une attractivité grandissante et de nouveaux arrivants. Une conclusion à laquelle sont parvenus les commerçants, notamment grâce au cas de la famille Lucca-Pope. Tenanciers d’un bar, ils ont constaté l’arrêt des attaques à leur encontre après avoir affiché sur leur devanture qu’ils habitaient dans le quartier depuis maintenant huit ans, avec des enfants scolarisés localement. Une nécessité de se justifier qui en a choqué plus d’un. […]

Car ce sont bel et bien les transformations récentes qui cristallisent les tensions. Nombre d’attaques ont ainsi consisté à accuser les commerçants de n’être intéressés que par le profit, ainsi que de faire flamber le marché de l’immobilier. Des actes se proclamant contre la “gentrification”, un phénomène théorisé dans les années 1960 par Ruth Glass, une sociologue anglaise, qui désigne (pour simplifier) l’installation de ménages aisés dans de vieux quartiers populaires, remplaçant ainsi petit à petit les anciens habitants et transformant leur environnement. Un processus en pratique plus complexe – se référer par exemple aux travaux d’Alain Bourdin, sociologue et urbaniste français – mais qui résume bien ici la situation de Melbourne.

Des violences qui ne découragent pas pour autant ces commerçants, du moins pas encore. Car malgré l’accueil globalement chaleureux, Shayne McCallum déplore le fait que “certains ne supportent pas que ce soit une zone qui change”. 

[Repris de leur presse: Kombini.com, mardi 3 janvier 2017]


[…] Le journal The Age parle à ce sujet de véritable «guerre contre les hipsters». En effet, 8bit Burger n’est pas le premier établissement à avoir été visé. Le restaurant barbecue Up in Smoke (avec sa vaste sélection de bières artisanales) a aussi été couvert d’insultes anti-hipsters. Il y a deux ans, des affiches anti-gentrification étaient apparues sur la devanture du bar Littlefoot et la serrure remplie de glue. Les attaques ont cessé lorsque les propriétaires ont affiché une lettre expliquant qu’ils vivaient dans la ville depuis huit ans, qu’ils étaient locataires et envoyaient leur enfant à l’école publique du coin. […]

Mais jusqu’à présent, un des plus impressionnants mouvements de rejet des hipsters a eu lieu à Londres en 2015, lorsqu’une centaine de manifestants ont attaqué un bar à céréales dans le quartier de Shoreditch. Sur la page Facebook des militants, on pouvait lire la revendication suivante:

«Nous voulons des logements abordables. Nous ne voulons pas de bars à gin éphémères, ni de pains à burgers briochés. Nous voulons un sens de communauté.»

[Repris de leur presse: Slate.fr, mardi 3 janvier 2017]