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[Publication] Lucioles n°20 – Décembre 2014

Yuan’é Hu

arton4003-e3185Nous sommes le jeudi 2 août 2012, comme presque chaque jour depuis son arrivée difficile sur le territoire français huit mois plus tôt, Yuan’é Hu est là, sur le pavé bellevillois. Comme plusieurs centaines d’autres chinoises d’une quarantaine d’années, elle a quitté sa vie, sa fille, sa famille et ses amis pour la grande traversée. L’Europe et ses promesses, la promesse d’un salaire « décent », de conditions de travail moins dures, d’une « liberté » mise en scène sur les rares médias occidentaux qui n’ont pas été filtrés par les autorités du Parti Communiste Chinois. Mais comme tant d’autres, Yuan’é Hu, à qui un passeur promettait un travail comme les autres et un salaire qui lui permettrait de renvoyer un peu d’argent au pays, et peut-être un jour des papiers, s’est bien faite avoir. C’est ainsi qu’elle finit sur le trottoir à vendre son corps dans des conditions de misère, à partager une chambre avec huit autres femmes à qui, comme elle, on a refusé toute dignité.

Peut-être que Yuan’é Hu était impressionnée par l’exhibitionnisme de certains de ses compatriotes, les quelques-uns qui flânent dans des 4×4 et des limousines le jour de leur mariage, qui ont eu les papiers et qui ne se soucient plus que d’eux-mêmes, la plupart du temps, en exploitant les moins chanceux d’entre eux. Peut-être Yuan’é Hu s’imaginait pouvoir bénéficier d’une solidarité de la communauté, elle n’en a reçu que du mépris, de la honte et de l’exclusion. Comme souvent. Comme on dit parfois, « le dernier rentré ferme la porte », et « chacun pour sa gueule ». À sa fille, qu’elle essayait de contacter tous les quinze jours, elle racontait travailler dans la confection, complétant ses journées par un travail occasionnel de nourrice, « que c’était dur et fatiguant, mais que tout allait bien »

Évidemment, comme pour beaucoup de sans-papiers, exploités, mutilés par la misère, harcelés par les flics et privés de tout confort, Yuan’é Hu n’a pas vraiment eu le choix lorsque de misérables individus lui ont expliqué que pour rembourser ses passeurs elle devait tapiner, ou crever dans la terreur.

Nous sommes le jeudi 2 août 2012, comme presque chaque jour depuis son arrivée difficile sur le territoire français huit mois plus tôt, Yuan’é Hu est là, sur le pavé bellevillois. Elle attend sur le goudron brûlant du terre-plein de Belleville qu’un client se présente à elle et lui offre, en échange de sa dignité, quelques billets qui passeront directement de la poche du client à celle du proxénète. Celui-ci négocie, les prix ne lui conviennent pas. Dans ce monde, acheter un corps, c’est un peu comme acheter un tapis, ça se négocie. Yuan’é Hu transige, elle accepte. Elle emmène le client dans la sordide cage à poule qu’elle loue pour les passes. On ne la retrouvera pas avant le soir, dénudée, étranglée avec la sangle de son sac à main, des traces de violences à l’extérieur comme à l’intérieur de son corps. Yuan’é Hu est morte.

Morte de l’indifférence. Morte dans l’indifférence. Morte de la misère. Morte de la trahison. Morte de la confiance. Morte des frontières humaines. Morte de la violence des hommes.

La justice vient de condamner son meurtrier à 20 ans de prison, comme si celui-ci était le seul responsable de sa mort. Comme si c’était un « fait divers » isolé et déconnecté de tout contexte social, le fait d’un homme dont l’élimination réglerait le problème. Comme si cette même justice d’abattoir qui chaque jour enferme et expulse des centaines de personnes à la chaîne parce qu’elles ne possèdent pas le bon bout de papier n’avait rien à voir là-dedans (on se souviendra par exemple des prostituées chinoises sans-papiers enfermées en centre de rétention en décembre 2013 suite à un coup de filet dans le XIIIe ardt. justifié par la « lutte contre le proxénétisme » et des dizaines raflées ce même mois par les flics à Belleville). Comme si la terreur d’Etat, à travers ses juges et ses flics, ne portait pas la responsabilité des morts quotidiennes de prostituées sans-papiers, de migrants tirés à vue comme des lapins aux frontières de l’Espagne, coulés en masse sur des rafiots de misère au large de l’Italie ou échoués sur les barbelés de Grèce. Comme si les porcs en uniformes, qui jouent aux protecteurs de la veuve et de l’orphelin n’étaient pas responsables de la peur-panique permanente qui poussa Yuan’é Hu à vivre cachée des yeux des riches et des divers uniformes, à vivre comme une mort-vivante, clandestinement, indésirable. Yuan’é Hu pensait qu’elle devait tapiner ou crever dans la terreur, mais au final, ce fut les deux.

Aujourd’hui, nous avons envie de pleurer Yuan’é Hu et tous les autres, mais la tristesse n’a jamais fait tomber de murs, la rage et la révolte, elles, oui.

À Yuan’é Hu, à toutes celles et ceux que la misère tue en silence, que l’Etat tue sans même se salir les mains, que le capitalisme affame sans que personne n’ait à se sentir responsable.

À l’idée qu’un jour nous nous soulèverons, indésirables de ce monde, et vengerons les offenses des Etats, des flics, des patrons et des communautés.

Mort aux pouvoirs.

Extrait de Lucioles n°20, Bulletin anarchiste de Paris et sa région, décembre 2014 [Publié sur non-fides]

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[Publication] Avalanche n°3

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Sommaire:

  • 03 – Edito
  • 04 – Allemagne – Pas d’illusion, pas de palais de justice, pas de compromis
  • 08 – France – Frapper là où ça fait mal
  • 09 – Espagne – Contre les alliances, contre la centralité
  • 11 – Chili – Nous sommes l’attaque, nous sommes le feu contre l’État
  • 13 – Chili – Pour une critique pratique
  • 15 – Chili – L’action et la solidarité sont urgentes, le reste n’est que prétexte
  • 18 – E-U – Voitures, fusils, autonomie
  • 24 – Syrie – La résistance de Kobani – un exemple de solidarité sélective
  • 27 – Espagne – Notes sur un débat en cours autour de l’anonymat
  • 30 – Grèce – A propos du débat en cours en Grèce sur la question de l’organisation informelle
  • 33 – Grèce – Des journées libératoires d’attaque

Contact: correspondance(A)riseup.net

Les anciens numéros sur le site : avalanche.noblogs.org

[Paris] Enièmes coups de pressions contre le bulletin ‘Lucioles’

acabL’après-midi du 27 octobre 2014, au métro Belleville, la BST débarque une fois de plus. Cette fois-ci, ils sont là pour nous, certainement après nous avoir repéré à travers leurs caméras pendant que nous diffusions le bulletin. Ils arrachent alors des exemplaires du n°19 accrochés aux grilles. Après avoir décortiqué le contenu du journal (oui, ils savent lire), ils décident de contrôler les deux premières personnes qui leur tombent sous la main. Les deux compagnons se font alors embarquer et seront placés en garde à vue au commissariat central du XIXe arrondissement, rue Erik Satie. Ils seront déférés après 24h et inculpés pour refus d’empreintes (une date de procès a été fixée pour janvier). Ils ressortent également avec une convocation pour « injure publique », se référant au contenu du bulletin, visiblement par rapport au court article « « Maïs chaud ! » et harcèlement de rue à Belleville ». Depuis quelques années, nous ne comptons plus les contrôles, les menaces, les convocations, vérifications d’identité, tentatives d’intimidation, les gardes à vues et les vols liés à la diffusion du bulletin dans le Nord-Est de Paris. Il s’agit de leur part, en toute logique et sans surprise, de mettre un frein à la diffusion des idées et pratiques anarchistes et révolutionnaires dans le quartier.

Nous sommes bien conscients de n’être qu’une petite épine dans le pied de ces sales flics (BST & compagnie) dont le véritable travail reste de mener la guerre aux indésirables (harcèlement des vendeurs de maïs et des prostituées, rafles de sans-papiers, etc.). En pissant là pour marquer leur territoire, ils cherchent à empêcher que les diverses formes de révoltes puissent se rencontrer. Empêcher la diffusion du bulletin est une petite partie de cette stratégie.

Ce communiqué n’a pas pour but de nous victimiser lorsque tant de gens vivent chaque jour une répression bien plus violente de la part des assassins en uniformes. Notre but est de sortir de la logique que l’ennemi cherche à faire prévaloir : une gueguerre privée entre eux et nous, de laquelle nous ne ressortirons jamais gagnants en raison de l’asymétrie des forces. Car nous nous foutons bien d’eux, et c’est avec les habitants du quartier avec qui nous partageons ce bulletin depuis plusieurs années que nous souhaitons dialoguer, en espérant partager bien plus que la belle mais banale haine du flic. Celles et ceux qui se mangent la même répression que nous, et qui se reconnaissent potentiellement en nous comme nous nous reconnaissons en eux et en elles. L’objectif principal de Lucioles étant de maintenir la continuité de la diffusion des idées anarchistes dans la rue, rien ne nous arrêtera. Et que cette petite feuille puisse être un instrument, parmi d’autres, dans les mains des exploités, tant que ce monde d’autorité ne sera pas détruit, continuera la guerre sociale en cours depuis toujours.

Tout continue, vive l’anarchie.

Quelques contributeur/ices de Lucioles.

Pour rappel, on pourra relire le texte Anarchistes vs. Police : nous ne voulons pas de leur guerre privée, publié en décembre 2013 dans Lucioles n°14. Ceux qui souhaitent participer aux diffusions du bulletin et leur montrer que nous ne baisserons pas les yeux face à la terreur d’Etat, peuvent nous contacter à l’adresse lucioles(A)riseup.net

[Publication] Sortie du n°4 de Salto – subversion & anarchie

Sommaire du n° 4 – août 2014

  • Pensée et dynamite
  • Marge de manœuvre – A propos de l’urbanisme
  • Urbanisme et ordre
  • Syncopes
  • Notes sur la démocratie
  • Parlons d’attaque
  • La guerre ou la guerre
  • Hors-jeu international et jeu internationaliste
  • 2014-18 – Le passé et le futur vs. le présent
  • Le bandit et le géographe
  • Spectacle
  • Pour régler les comptes
  • Omission volontaire – A propos de l’anonymat et Salto

Correspondance

  • Adrénaline et oxygène
  • L’œuvre des maîtres

Annexe

  • Nuits blanches et ciels étoilés
  • Annexe à un débat avorté sur l’anonymat et l’attaque

Les textes des numéros précédents sont disponibles sur le site salto.noblogs.org. Pour commander des numéros, il suffit d’envoyer un mot à salto (at) riseup.net ou écrire à:

Salto
c/o Bibliothèque anarchiste Acrata
32, rue de la Grande Ile
1000 Bruxelles