[Tract diffusé ces jours-ci dans les rues de Marseille]
La prison n’est pas seulement ce bâtiment glauque à la lisière de la ville et attaquable en tant que tel. Elle représente le degré d’enfermement le plus abouti et la continuité des autres institutions (patriarcat, école, religion, travail, justice..) qui tendent à soumettre et formater les individus.
Alors que plusieurs mutineries viennent de briser la routine mortifère des taules de Valence, Aiton et Poitiers, l’État annonce la création de 16 000 nouvelles places de prison. Dans le sud-est, ce sont six nouvelles maisons d’arrêt qui se rajoutent aux chantiers déjà en cours (Marseille, Draguignan, Aix-Luynes 2…). Dans un premier temps à proximité de Nice, Nîmes, Avignon (sites considérés comme prioritaires) puis, à plus long terme, autour de Marseille, Toulon et Fréjus.
La « diminution de la surpopulation carcérale- » et les « -conditions dignes d’enfermement » mises en avant par les porte-voix du pouvoir ne sont que des prétextes sordides destinés à faire passer la pilule. De quelle dignité osent parler ces charognard-es qui enterrent des milliers d’ individus sous des mètres cubes de béton, les séparant de leurs proches, les privant d’air et de lumière, tentant de contrôler chacun de leurs gestes ? Alors que 70 000 personnes croupissent derrière les barreaux, que les mesures dites « alternatives » à l’enfermement se multiplient (contrôles judiciaires, bracelets électroniques, semi-libertés…) et que les conditions de (sur)vie sont toujours plus dures, nul doute que ces 33 nouvelles prisons se rempliront aussi vite que les précédentes.
Qu’elles soient vétustes ou modernes, les cages du pouvoir ont la même fonction : tenter de briser certains individus et imposer aux pauvres et révoltées potentiel-les, par la peur et la résignation, ce monde basé sur la domination et l’exploitation, la compétition et le fric.
En réduisant encore les contacts entre détenu-es, en utilisant vidéo-surveillance et informatique pour « sécuriser » la prison et protéger davantage les maton-nes, l’État tente de bannir les évasions, actes de rébellions et mutineries susceptibles de saper son autorité et de nourrir des chemins de révolte de chaque côté du mur.
Dans ce monde d’un cynisme débridé, l’enfermement est une manne de fric considérable pour de nombreux vautours. Architectes, banques, boîtes du BTP, agences d’intérim (…) se font de la maille en finançant, construisant, assurant la gestion quotidienne des taules, sans compter les boîtes qui exploitent les prisonnier-ères pour des salaires encore plus insultants que ceux pratiqués dehors. (Vinci, Bouygues, Eiffage, Spie Batignoles, Appave, Sodexo, Yves rocher, Orange… )
Dans ce monde d’un cynisme débridé, qui voudrait voir chacun-e piétiner la gueule des autres pour ramasser des miettes et sortir la tête de l’eau, de nombreux-ses galérien-nes sont poussé-es à endosser l’uniforme ou construire leurs propres cachots, entre chantage à la survie et harcèlement exercé par des travailleurs sociaux. Mais pourquoi accepterions-nous de vivre à l’étroit dans ce qui ressemble toujours plus à une prison à ciel ouvert, à slalomer entre les gardien-nes de l’ordre établi et les multiples yeux -caméras, citoyens zélés- du pouvoir ?
Refuser de constituer un rouage, si petit soit-il, de cette machine à broyer et mutiler les individus est la moindre des choses pour quiconque garde au cœur des rêves de liberté. Il se pourrait bien que le pas suivant, incertain et passionnant, soit d’attaquer toutes celles et ceux qui tirent profit de notre mise au pas forcée ainsi que les institutions qui maintiennent leur pouvoir sur nos vies… Il y a autant de raisons que de manières de (tenter de) saboter cet ordre mortifère.
NOUS NE SUBIRONS PAS CE NOUVEL AFFRONT EN BAISSANT LA TÊTE !
DÉTRUISONS TOUTES LES TAULES ET LE MONDE QUI EN A BESOIN !
[Publié sur mars-infos.org, 22 octobre 2016]