Notre rage n’est pas aveugle. Un point sur la défense de ce monde et la dissociation de la révolte.
Dès le lendemain de la manifestation parisienne du 14 juin, les médias se sont emballés sur un moment bien précis de celle-ci : la casse d’une quinzaine de baies vitrées de l’hôpital Necker-Enfants malades. Le jeu du gouvernement a été de créer le scandale, pour diviser, comme toujours, gentils et méchants. Ça marche comme sur des roulettes, bien évidemment, pour tout ce qu’il y a de démocratique, avec le cœur de pleureuses dans la presse. On lira par exemple, à côté des prises de positions des politiciens de tous bords, le communiqué de l’Institut des maladies génétiques Imagine (sur lequel on reviendra) : « […] cette atteinte au symbole que représente l’hôpital a pour but de faire vaciller le socle de valeurs partagées qui fondent notre société démocratique. Ce sont elles qui ont été mises en cause et que nous défendons aujourd’hui. » Et le moustachu en chef, Martinez, dénonce “des actes aveugles” qui discréditeraient l’opposition à la Loi travail – comme si le but des révoltés qui étaient dans les rues parisiennes ce mardi-là (et plein d’autres fois) c’était le simple retrait d’une simple loi, ou la défense du Code du travail.
Pas très différent du côté « radical ». Sur le site lundi.am, référence obligée de ce courant politique qu’est l’appelisme, par exemple, on se croirait au bar de la CGT. L’auteur d’un « témoignage de parent1 » (toujours les premiers concernés, toujours la famille…) aux bons sentiments « comprend parfaitement » que « la jeunesse […] voie un symbole » dans la casse, cependant il trouve « idiot » de briser les vitres d’un hôpital. Une prise de position bien sage et de gauche qui finit pour demander au gouvernement, en plus du retrait de la Loi travail, un financement correct des hôpitaux français. Donc, dans leur monde à eux, les blanquistes imaginaires, il y aurait aussi l’AP-HP (Assistance publique – hôpitaux de Paris, l’établissement public de santé de la région Île-de-France) ? Faudra le noter dans la prochaine réédition de leur programme post-révolution, l’indispensable « Premières mesures révolutionnaires » de sieur Hazan, celui qui sur le même lundi.am, prônait, il y a peu, « la police avec nous ». Un peu étonnant sur un site qui depuis trois mois nous sert des appels à l’insurrection, en mode « le monde ou rien »… Un peu étonnant de la part d’un site qui, le 23 novembre 2015, nous faisait l’éloge des assassins islamistes, « affranchis » parce qu’ils ne redouteraient pas la mort…2
Un texte signé Nantes Révoltée3 parle, lui, de « quelques égarés pavloviens venus casser du verre – une petite librairie juste à côté a subi le même sort que l’hôpital » et nous informe (sur quelles bases ?) que ceux qui ont brisé les baies vitrées de l’hôpital « n’ont même pas compris ce à quoi ils touchaient ». Mais s’il y a quelque chose de pavlovien, ce sont bien les prises de distance par rapport à cette attaque, face à la répression attendue. Et de plaindre les vitres d’un commerce, elles aussi frappées par la rage des révoltés (pas nantais, du coup, ou pas tous). Idem pour ce qui est du site d’infos des citoyennistes radicaux de la capitale, Paris-luttes.info, qui, en plus de son récit victimisant habituel et le fait de renvoyer à la fine analyse de lundi.am, parle de « la mauvaise blague de l’hôpital Necker… »4. L’auteur se demande même les raisons de cette casse. Peut-être qu’il ne sait pas que les hôpitaux appartiennent à l’État ou à des grandes fondations ?
On est bien loin de la critique des institutions sociales, même de celle universitaire et non conflictuelle faite par exemple par un philosophe à la renommée radicale usurpée, comme Foucault, dont certains de ces citoyennistes sont des farouches admirateurs. Les prises de position de ces « radicaux » sont du simple copié-collé des déclaration ministérielles, avec en rab’ un peu de café-commerce de gauche et beaucoup de volonté d’esquiver la répression. Elles semblent faites exprès pour jouer le jeu étatique de la division entre les gentils et les méchants.
Mais on est aussi en plein dans le champ de la politique populiste. Il s’agit du même choix, conscient ou pas, qu’on peut voir à l’origine d’un épisode assez révélateur d’une époque peut-être riche en formes spectaculaires, mais assez pauvre en perspectives révolutionnaires. Lors de la manifestation du 26 mai, toujours à Paris, un groupe de personnes masquées, « du cortège de tête », les mêmes qui, peu de temps avant, applaudissaient la chute de la vitre d’un concessionnaire Skoda, se mettent en cordon devant une boutique Emmaüs Solidarité5, pour la protéger. Il y a en effet pas mal de monde qui en veut à Emmaüs et aurait bien saisi cette occasion. On peut bien imaginer ce que se sont dit les défenseurs de la propriété privée : ça ne se fait pas, Emmaüs c’est une assoc’ humanitaire, ça ternirait l’image du « mouvement ». Pourtant, il suffit de creuser un tantinet (et ça a été expliqué, en cette occasion-là), pour savoir qu’Emmaüs est une entreprise qui se fait plein de thune sur la misère des autres6. Une entreprise comme toutes autres, l’hypocrisie en plus.
Voilà le scandale, la profanation. Les humanitaires seraient des amis, sous-entend-on . Un hôpital, ça ne se touche pas, nous dit-on. Encore plus un hôpital où sont soignés des enfants. C’est un des symboles du vivre-ensemble : on est tous susceptibles d’y avoir recours, on est tous soumis à la Médecine, qui incarne une Science bienveillante et maternelle. Mais la main qui soigne est aussi celle qui tue. Non seulement parce que le secteur sanitaire public est une des parties de l’appareil de l’État, où on trouve aussi, entre autres, l’armée, la police, la justice. Tout comme la CAF, dont, comme les hôpitaux, on est nombreux à profiter volontiers – mais cela n’en fait pas quelque chose à défendre, parce qu’il s’agit seulement du côté nourricier d’une société fondée sur l’exploitation7.
Certes, ça arrive à (presque) tout le monde d’avoir recours aux soins d’un hôpital (et parfois ça sauve la vie et c’est tant mieux). Cependant, on ne doit pas le considérer comme un lieu « neutre » ou, pire, un « sanctuaire ». Dans un hôpital on nous soigne, certes, mais est-ce qu’on nous a jamais permis de choisir pour de vrai comment être soignés ou, encore mieux, comment ne pas tomber malades, dans un monde qui est producteur de nuisances et de mort (et dont le secteur sanitaire/pharmaceutique est une partie importante) ? Le secteur médical est en effet particulièrement représentatif du côté ambivalent de la science (et de l’État).
Mais un hôpital n’est pas seulement un lieu où on se fait soigner, c’est aussi un lieu où on fait de la recherche, qui sert notamment au développement du secteur pharmaceutique. En effet, la recherche médicale, loin de l’idéal de solidarité et d’humanisme véhiculé par l’idéologie scientiste, est dirigée avant tout par les profits de l’industrie pharmaceutique. Et on sait tous où mène la recherche : à plus d’asservissement. Puis, il y a certains hôpitaux haut-de-gamme où des scientifiques font de la recherche de pointe. C’est le cas, par exemple, de la recherche en génétique. On nous la présente comme la solution aux maladies, notamment les maladies sites « orphelines » et les cancers (ces derniers sont notamment le produit de ce modèle économique et social). La recherche sur le génome promet bien pour ce qui est d’avoir encore plus de prise sur la vie de chacun et chacune. Qu’on pense seulement au bon outil de contrôle social qu’est l’identification via l’ADN, une technique issue du médical, encore futuriste il y a 30 ans, ordinaire (un ordinaire couleur gris-prison) aujourd’hui. Et l’hôpital Necker-Enfants malades est un des centres français de la recherche génétique, avec l’Institut des maladies génétiques Imagine – précisément ceux et celles qui se plaignent des vitres cassées et des valeurs démocratiques pas si partagées. Mais pour celles et ceux qui veulent tenter d’esquisser des perspectives révolutionnaires, leurs valeurs et leur science sont clairement des ennemis et doivent finir comme leurs baies vitrées.
Ce qui a été frappé mardi ce sont les vitres d’un bâtiment. Il s’agit d’un dommage économique à l’AP-HP8. Personne parmi les patients de l’hôpital n’a été incommodé (ou si ça a été le cas, plutôt par les gaz et grenades de désencerclement de la police).
Le problème est : est-ce que certains peuvent s’arroger le pouvoir de décider pour tout le monde quelles sont les cibles à attaquer et celles qui ne le sont pas (à priori, en défendant une assoc’ humanitaire, ou a posteriori avec leurs prises de distances de la casse contre l’hôpital Necker, qui a échappé à leur protection) ? Non, les seuls établissements à casser ne sont pas banques, agences d’intérim et McDo9, tout le monde en conviendra. Si on veut porter une critique plus profonde de ce monde, il y a plusieurs ruptures à faire, notamment avec des mythes de la gauche comme le respect de l’humanitarisme et de la science, l’attention au discours médiatique (à « ce que pensent les gens ») et la recherche du consensus.
L’AP-HP et les associations humanitaires sont, pour plein de raisons différentes, des cibles légitimes de la rage de ceux et celles qui, depuis trois mois, descendent dans les rues avec l’excuse de la Loi travail, tout en sachant que le Code du travail que les syndicats nous appellent à défendre sert seulement à nous attacher au turbin. Les raisons de se révolter appartiennent à celles et ceux qui passent à l’attaque (au lieu de radoter sur internet) et si la discussion sur les perspectives et les méthodes est nécessaire et peut être enrichissante, défendre des entreprises et des structures étatiques ne rentre sûrement pas dans des perspectives révolutionnaires. Encore moins pour ce qui est de la dissociation et des diverses prises de distance.
Si on veut tenter un dépassement vraiment révolutionnaire, il ne suffit pas de porter des discours (ou choisir des cibles) qui seraient « compréhensibles par tout le monde ». C’est le cas par exemple du très consensuel slogan « tout le monde déteste le police ». Certes, on la déteste tous, mais cette haine partagée n’est pas suffisante comme le plus petit dénominateur commun : les assassins islamistes aussi détestent la police. Nous devons viser vers le haut, vers la révolution. Notre révolte se doit de ne pas se limiter aux apparences, mais de cibler les racines de ce qui nous enferme.
Et non, les révoltés qui ont cassé les baies vitrées de l’Hôpital Necker ce 14 juin ne sont pas des « idiots », ni des « égarés pavloviens », ni « des types bien seuls »10. Ils sont des révoltés, et nous sommes à leurs côtés.
Il n’y a rien d’aveugle dans ce geste, mais bien une belle suggestion critique allant vers le dépassement d’un « mouvement » trop limité dans ses perspectives. Laissons derrière nous les mythes d’une gauche qui ne fait rien d’autre que défendre ce monde. Et prenons garde aux politiciens en noir qui parfois peuvent se trouver près de nous, mais qui se dissocieront de la révolte dès qu’elle sera sauvage.
Comme le dit un slogan récent : « Nous sommes tous des casseurs »… ou seulement par moments ?
Et comme le disait un tag qui a fait scandale en 2006 et qui n’a rien perdu de son urgente actualité : « Mort à la démocratie !»
27 juin 2016,
quelques anarchistes d’ici et d’ailleurs
Notes :
1 « Sur l’instrumentalisation des vitres de l’hôpital Necker – Témoignage d’un parent. » https://lundi.am/Sur-l-instrumentalisation-des-vitres-de-l-hopital-Necker-Un-parent
2 « La guerre véritable » https://lundi.am/La-guerre-veritable
3 « De l’hôpital Necker dans l’offensive spectaculaire marchande » https://nantes.indymedia.org/articles/35073
4 « Tentative de récit de la longue journée de lutte du 14 juin » http://paris-luttes.info/tentative-de-recit-de-la-longue-6166
5 Cf. « Pourquoi ils ne sont pas à defendre ? » https://nantes.indymedia.org/articles/34748 et « Pourquoi Emmaüs ou pourquoi pas Emmaüs ? » https://nantes.indymedia.org/articles/34806.
6 Cf. par exemple pourquoi Emmaüs ou pourquoi pas Emmaüs ? https://attaque.noblogs.org/post/2016/06/04/pourquoi-emmaus-ou-pourquoi-pas-emmaus/
7 Pour une critique de l’humanitarisme associatif et de l’État social, cf. « On ne veut pas d’aumône ! – Quelques notes sur la complicité et la solidarité », dans Des Ruines, n.1, hiver 2014.
8 Comme il n’y a pas de petit business, la direction de l’AP-HP a lancé un appel à dons sur internet, suite à l’attaque subie par l’hôpital Necker (apparemment les dégâts seraient de 200.000 euros – ou la massette miraculeuse !) Ils ont ramassé la coquette somme de 127.000 euros avant de retirer par honte leur appel aux dons. Cf. « Appel à dons pour l’hôpital Necker : l’immonde manipulation de l’AP-HP » http://paris-luttes.info/appel-a-dons-pour-l-hopital-necker-6284
9 “« Le monde ou rien » : rencontre avec le Mili, en première ligne des manifs jeunes contre la loi travail.” https://news.vice.com/fr/article/le-monde-ou-rien-rencontre-avec-le-mili-en-premiere-ligne-des-manifs-jeunes-contre-la-loi-travail?utm_source=vicenewsfrtw
10 Cf. la vidéo de dissociation «Hôpital Necker – République – Etat d’urgence », publiée sur Paris-Luttes.info (cette qualification est à la min. 4’50). http://paris-luttes.info/video-hopital-necker-republique-6237
[Publié sur Attaque, 1er juillet 2016]
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Contre la facilité : sur l’attaque à la massette des vitres de l’Hôpital Necker
Des milliers de vitres ont été brisées mardi. Mais une dizaine d’entre elles ont recueilli plus d’attention qu’elles n’en méritaient. Une volée de baies vitrées de l’hôpital Necker ont été minutieusement étoilées lors de la manifestation. Mais tandis qu’on n’attend rien d’autres des médias que de s’indigner jusqu’à la nausée, il est plus surprenant de voir des « alternatifs », « anticapitalistes », ou autres contestataires de rue ou de salon se sentir sommés de s’exprimer à leur sujet.
Alors puisque la dissociation est de mise lorsque ces commentateurs sociaux suivent le sens du vent et surfent les mêmes vagues que nos ennemis tant que leur planche est rouge ou noire [1], nous affirmons préférer la plongée sous-marine et n’avoir que faire des mouvements de surface.
Il y a mille raisons de s’attaquer à un hôpital quelconque et à celui-là en particulier, et l’envie brute de se passer de raisons en est une.
Après tout, peu importe que cet hosto porte le nom de Jacques Necker, banquier de profession, puis successivement conseiller des Finances, directeur général du Trésor Royal, directeur général des Finances, Premier ministre des Finances de Louis XVI et j’en passe. Peu importe que ce brave homme se soit remarqué dans son rôle de contre-révolutionnaire en 1789, lorsque les casseurs détruisaient la Bastille pierre par pierre. Peu importe qu’au même moment, il ait repris à son compte toutes les méthodes imaginables pour calmer la populace en furie.
Après tout, peu importe que l’hôpital soit un symbole de l’oppression médicale et de ce que le pouvoir scientifique se permet de faire subir. Peu importe que des milliers de femmes soient traitées comme des machines à reproduire derrière ces grandes baies vitrées, peu importe que des personnes intersexuées soient mutilées à la naissance derrière ces si charmantes plaques de verre. Peu importe que l’hôpital nous arrache chaque année des proches, des compagnon-ne-s en les psychiatrisant et en les internant. Peu importe que les laboratoires pharmaceutiques prolifèrent sur le dos de nos maladies et de celles de nos enfants en profitant de la manne financière de la Sécurité Sociale. Peu importe également que les internes profitent de l’anesthésie de patients et de patientes endormies pour tester sur eux et elles tout un tas de pratiques sans leur consentement.
Après tout, peu importe que l’hôpital soit un lieu de collaboration principal du pouvoir, dans nos mouvements comme tout le reste de l’année, qui balance les individu-e-s qui s’y rendent en croyant obtenir du soin, et qui en sortent avec des menottes. Peu importe qu’il soit également l’endroit où se retrouvent par alternance avec la prison celles et ceux que l’État veut anéantir.
Après tout, peu importe que ce monument historique, éminent symbole de la puissance de l’État, bâtiment colossal tout de verre et d’acier, nous rappelle sans cesse que nous ne sommes que de médiocres pions face à la grandeur de nos maîtres. Peu importe que ces baies vitrées de 10m de haut coûtent une fortune et que leur réparation fasse cracher de la thune à ces ordures.
Et si, après toutes ces raisons qui nous importent peu, la simple satisfaction, du haut de notre mètre 70, de filer des courants d’air à des salopards en costards ou blouse blanche, à l’aide d’une simple massette, jusqu’au plus haut sommet de l’État, avait pu donner l’énergie d’agir à une individualité révoltée ?
Et si ces personnes que certain-e-s trouvent idiotes d’avoir attaqué ces vitres, étaient les mêmes personnes qui attaquent les banques et les assurances, et qui nous réjouissent tou-te-s ? Quelle présomption, quel sentiment de supériorité nous permet de juger la pertinence de leurs motivation, et de décerner les bons et les mauvais points dans le désordre social ?
Et si, au lieu de s’empresser de cracher sa bile sur des individu-e-s présent-e-s à nos côtés dans des moments aussi intenses, sur le simple prétexte que l’on ne comprend pas leurs motivations, on pouvait s’efforcer de comprendre, et à défaut, de se taire ? Et si, au lieu de suivre avec paresse le flot d’immondices charié par les médias, on s’efforçait de produire une réflexion sans influences ?
Pourquoi se précipiter et se réfugier dans la facilité lorsqu’un acte « incompréhensible » surgit dans ce genre de moment ? Pourquoi tomber dans la dissociation que nous intime le pouvoir alors que nous pourrions profiter de ce genre d’événement pour discuter sérieusement de notre rapport à l’inconnu et à l’inattendu ? Les discussions qui ont abouties à l’écriture de ce texte sont aussi riches que tous les instants de vie que nous partageons dans la rue. Parce qu’elles s’attaquent à nos certitudes, à un moment où on pourrait croire que tout s’éclaircit. Lorsque les raisons de casser des banques et des agences immobilières nous semblent devenir consensuelles, il se trouve des choses qui nous permettent de creuser plus encore nos réflexions révolutionnaires. L’inattendu est pour moi ce qui rend la vie passionante, et c’est aussi ce qui fait si peur à ce pouvoir qui souhaiterait tout prévoir.
Saisissons-nous de ces inattendus pour affronter nos convictions et les faire évoluer, plutôt que de les balayer d’un revers de main pour les ramener à un triste connu. Et c’est ainsi que nous serons redoutables.
Nous n’avons pas peur de l’avenir, c’est leur avenir qui a peur de nous. Et il a bien raison.
[1] lundi.am, mercredi 15 juin 2016 : « Au milieu de tout cela, quelques vitres de l’hôpital Necker ont été brisées. Bien que les vitres en question n’aient pas d’autre rôle que celui d’isolant thermique : j’en conviens grandement, ce n’est pas très malin. Certes, briser les vitres d’un hôpital, même par mégarde, c’est idiot […]
Si les jeunes émeutiers qui ont cassé les vitres de Necker ont été idiots, […] «
« n-n-n » sur Paris-luttes.info, jeudi 16 juin 2016 : « […] il y a eu la mauvaise blague de l’hôpital Necker… Une personne seule a étoilé une dizaine de ses vitres, sous le regard circonspect de pas mal d’autres manifestant-e-s, qui soit ne savaient pas qu’il s’agissait d’un hôpital, soit ne comprenaient pas pourquoi cette personne s’y attaquait (Je serais d’ailleurs curieux d’en connaître ses raisons) […] »
Nantes Révoltées sur Indy Nantes, jeudi 16 juin 2016 : « […] Visuellement, seule une longue baie vitrée grise longeant le boulevard s’offrait à la vue des manifestants – ce qui n’est pas le cas dans le sens inverse de la marche. Nul doute que les quelques égarés pavloviens venus casser du verre – une petite librairie juste à côté à subi le même sort que l’hôpital – n’ont même pas compris ce à quoi ils touchaient. […] Si les enfants soignés dans cet hôpital ont été incommodés, c’est probablement plus par l’usage massif de l’arsenal policier que par des coups, aussi idiots soient-ils, sur la baie vitrée du bâtiment »
[Publié sur indymedia nantes, 17 juin 2016]
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Chasubles et K-way jaunes
Il faut stopper les casseurs (CGT)
« Le Premier ministre a laissé entendre qu’il y aurait complicité entre le service d’ordre de la CGT et les casseurs« , a dénoncé sur France 2 le secrétaire général de la CGT Philippe Martinez, en parlant de « provocations« . Or, selon lui, il n’y a « aucune relation entre ce que font les casseurs et les manifestants« .
Selon le leader de la CGT, qui a rendez-vous vendredi matin avec la ministre du Travail Myriam El Khomri, « la sagesse voudrait que le gouvernement suspende le débat parlementaire » de sorte que « la sérénité revienne« . Selon lui, la police reçoit « des ordres de non intervention face aux casseurs« . « Cela fait trois mois qu’on dit au gouvernement il faut stopper les casseurs« , a-t-il dit.
[AFP, « Violences dans les manifestations : Martinez rejette toute « responsabilité » de la CGT« , 15/06/2016 à 22:14]
Les casseurs sont des idiots (lundimatin)
« Au milieu de tout cela, quelques vitres de l’hôpital Necker ont été brisées. Bien que les vitres en question n’aient pas d’autre rôle que celui d’isolant thermique : j’en conviens grandement, ce n’est pas très malin. Certes, briser les vitres d’un hôpital, même par mégarde, c’est idiot ; mais bla bla bla«
« Si les jeunes émeutiers qui ont cassé les vitres de Necker ont été idiots, bla bla bla«
[lundimatin, après avoir publié le 18 avril un article de l’éditeur du Comité Invisible affirmant que crier « Tout le monde, déteste la police ! » « ce n’est pas intelligent » et qu’il vaudrait mieux clamer « la police avec nous !« , a tenu à déroger à son rythme hebdomadaire afin de se distancier publiquement des 15 vitres fendues de Necker (parmi des centaines) et ce dès le lendemain de la manif, en plein scandale médiatique contre les « casseurs », et en particulier sur ces vitres-là, et alors que 41 manifestants sont toujours aux mains des flics, sans qu’on sache si une partie d’entre eux n’est pas précisément accusée de ces faits. Dont acte.
« Sur l’instrumentalisation des vitres de l’hôpital Necker – Témoignage d’un parent », supplément du 15/06/16 au #65 du 13 juin]
Rappel
« La casse est la manière la plus simple, la plus évidente, de déborder un dispositif policier. C’est aussi une des moins intéressantes, des plus ennuyeuses. Ce que la plupart des discours sur les casseurs négligent, c’est que ces derniers aimeraient mieux, le plus souvent, faire autre chose : percer des lignes de policiers pour libérer le cortège, occuper un bâtiment, partir en manifestation sauvage, tenir des barricades, laisser des tags inspirés, etc. La casse est souvent un pis-aller. C’est le degré zéro de la manifestation.«
[lundimatin, Réflexions sur la violence, VIII, #57 du 18 avril]
Les égarés de Nantes
« Il était très difficile pour les non-parisiens – autrement dit, une très grande partie du cortège – de deviner depuis le défilé arrivant de la Place d’Italie qu’il s’agissait d’un hôpital. Visuellement, seule une longue baie vitrée grise longeant le boulevard s’offrait à la vue des manifestants – ce qui n’est pas le cas dans le sens inverse de la marche. Nul doute que les quelques égarés pavloviens venus casser du verre – une petite librairie juste à côté à subi le même sort que l’hôpital – n’ont même pas compris ce à quoi ils touchaient. »
« La rue a été inondée d’un puissant gaz lacrymogène s’insinuant partout pendant des heures. Si les enfants soignés dans cet hôpital ont été incommodés, c’est probablement plus par l’usage massif de l’arsenal policier que par des coups, aussi idiots soient-ils, sur la baie vitrée du bâtiment. »
(Nantes Révoltée, « De l’hôpital Necker dans l’offensive spectaculaire marchande », point 3 et 5 (extraits), indy nantes, 16 juin 2016)
[Repris de brèves du désordre, 15 juin 2016]
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Il existe des dizaines de raisons d’attaquer un hôpital (qui reste un bâtiment de l’Etat) et nombreuses d’entre elles sont développées dans ces deux textes. Si le sens commun voudrait que l’hôpital « soigne », il est nécessaire de rappeler le rôle répressif que celui-ci joue quand le personnel « porte secours » à un blessé en illégalité (un sans-papier, un délinquant ordinaire, etc…). Si ce blessé termine à l’hosto alors que les flics sont à ses trousses, l’institution médicale est la première à donner les renseignements nécessaires aux flics, à collaborer pleinement avec les forces de répression. C’est pourtant quelque chose à laquelle bon nombre d’hors-la-loi et de rebelles doivent faire face à un moment ou à un autre de leur vie: un compagnon ou un camarade qui se blesse après avoir mené une attaque contre une structure de ce monde fera tout son possible pour ne pas finir à l’hosto. Et les caillassages d’ambulance et agressions contre les pompiers dans certains quartiers devraient pousser certains à réfléchir plus largement sur le rouage de ces institutions qui sont réputées pour « sauver des vies » (d’ailleurs, les flics aussi sauvent parfois des vies – bien qu’ils en ôtent plus qu’ils n’en sauvent – contre la volonté des individus, la plupart du temps pour redorer leur blason dans la presse ou jouer leurs héros): quand quelqu’un décide de mettre fin à ses jours, ou qu’un SDF bourrée est en train de se noyer, etc.. Lors de cette même manif, on a pu entendre des acclamations venant d’une partie du tant fantasmé « cortège de tête » en direction des pompiers, qui intervenaient pour secourir un manifestant blessé. C’est aussi un exemple éloquent du manque criant de réflexion de ce milieu: le fait d’applaudir les pompiers, qui sont pourtant bel et bien tous des militaires (dans les grandes villes du territoire du moins: Paris, Marseille, Lyon, Toulouse, etc…), devrait faire bondir toute personne qui a des perspectives révolutionnaires. Et puis bon, depuis quand ceux qui éteignent les feux de la révolte sont/seraient des « camarades » ?
Un casseur anarchiste qui se fout de l’opinion publique
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Affiche collée sur la façade de l’hôpital « Necker-Enfants malades » le lendemain de la manif saccageuse par « les casseurs » (en plus du fait de s’exprimer au nom de tous les enragés, ces « casseurs » respectables portent l’idée que cette attaque aurait été une cible malencontreuse et que ces énormes baies vitrées auraient réveillé des pulsions destructrices de certains. Le fait même de penser que quelques vitres étoilées auraient mis en danger la santé d’enfants, et ce sans même parler des pluies de grenades mutilantes et de gaz lacymo asphixiant de la part des flics montre à quel point ces « casseurs » bisounours sont complètement à côté de la plaque et qu’ils rentrent parfaitement dans le jeu médiatico-étatique nauséabond initié à la suite de cette journée. Ils auraient pu aller au bout de leur position et dire les choses plus clairement: « Pardon l’Etat » aurait été plus appropriée.